Voici un bref compte rendu du sommet européen du Vedanta organisé par le centre védantique Ramakrishna et une réactualisation de la proposition faite dans le post 13 à la fédération védique (FVF) d’initier un projet pour présenter les spiritualités du subcontinent indien dans la grille de programme religieux d’A2 du dimanche matin.

1 Le sommet européen du Vedanta, 8 au 11 août 2024

L’hindouisme a commencé à se faire connaître en Occident après l’initiative prise par Vivekananda de le présenter à Chicago en 1893 devant un Parlement mondial des religions presque exclusivement chrétien. En France, c’est la biographie de Ramakrishna publiée par Romain Rolland en 1929 qui a suscité une vague d’intérêt. Un swami de l’ordre monastique fut invité pour résider en France afin d’y enseigner la philosophie du Vedanta. Ce qui a permis en 1948 la création d’un ashram, le centre védantique de Gretz qui a donc une longue expérience de communication spirituelle.

C’est en ce lieu qu’a été tenu un sommet européen du Vedanta avec des conférenciers remarquables provenant de plusieurs pays. Le vaste sujet de la philosophie védantique a été abordé sous des angles très complémentaires, jnana avec des scientifiques et des philosophes, bhakti aves des praticiens de la dévotion, raja avec des spécialistes du yoga. Après les conférences plénières, des approfondissements ciblés ont permis aux nombreux participants de choisir en fonction de leurs centres d’intérêt. Tous ceux que j’ai interrogés, habitués comme nouveaux venus, se réjouissaient d’être venus, ce qui fut mon cas.

Cet événement décidé il y a seulement trois mois à l’occasion de la venue en France du vice-président de la mission a prouvé la remarquable capacité d’organisation des bénévoles du centre Ramakrishna, logistique impeccable et service de traductions instantanées. J’ai regretté la présence clairsemée de membres d’autres associations de la FVF. Mais avec le mois d’août et les jeux olympiques, beaucoup de parisiens s’étaient éloignés.

Le succès de cette manifestation est l’occasion de relancer et actualiser ma proposition à la FVF (post 13) d’engager une dynamique collective pour obtenir un créneau dans les émissions religieuses d’A2 du dimanche matin dont la grande spiritualité indienne est absente. Certes, des bouddhismes y sont présentés, japonais, tibétains, vietnamiens…, mais assez éloignés de la réalité historique du sangha, ces moines errants ayant suivi le Bouddha.

2 Les spiritualités du subcontinent indien

L’Inde est la terre de naissance de l’hindouisme, du jaïnisme, du bouddhisme et du sikhisme. Le zoroastrisme, le christianisme et l’islam s’y sont implantés dès le Ier millénaire. C’est un grand carrefour spirituel qui peut être déterminant pour reconstruire une unité spirituelle universelle autour de la Parole et par la connaissance (le sens du mot Veda). Co-naître, c’est aussi naître avec l’autre en l’aimant, donc en partant sans préjugés de sa sensibilité pour mieux le comprendre. C’est un objectif du dialogue interreligieux ou interconvictionnel dans lequel plusieurs conférenciers s’étaient déjà engagés.

L’hindouisme est une mosaïque de concepts philosophiques, de pratiques cultuelles, de créativité artistique et de savoirs comme le yoga et la médecine ayurvédique qui partagent un substrat religieux vécu dans un syncrétisme tolérant. La référence au Veda qui le caractérise selon la définition de la Cour Suprême de l’Inde est devenue lointaine. Mais la dévotion reste une pratique quotidienne et la discipline des yogas du corps et de l’esprit est très présente. Beaucoup de touristes et chercheurs de vérité occidentaux se tournent vers l’Inde pour s’enrichir spirituellement. Les ashrams sérieux et nobles gurus peuvent les aider.

Dans la longue histoire indienne (plus de 40 000 ans pour les peuples dravidiens), les invasions ultérieures d’hommes et d’idées extérieurs à l’Inde ont été souvent sanglantes et oppressives, des nomades aryens aux conquérants musulmans et aux colonisateurs anglais. Le passé a laissé des traces, en particulier dans les relations entre hindouistes et musulmans. Le drame de la partition en a résulté malgré l’opposition courageuse de Gandhi, assassiné par un membre du RSS adhérent à l’idéologie nationaliste de l’Hindutva. Elle prône un État « hindou » défendant les cultures et religions de l’Inde face aux religions importées, l’islam et le christianisme, et canalise des violences interconfessionnelles.

Pourtant, la non-violence est une valeur fondamentale de la culture indienne, mais dans les villes surpeuplées, les foules peuvent devenir incontrôlables et violentes, surtout si elles sont manœuvrées par des agitateurs politiques. Dans ce contexte, la France peut offrir un cadre de dialogue respectueux pour une connaissance apaisée des anciennes traditions indiennes et de leurs riches spiritualités par un grand public largement ignorant des Ecritures sacrées en dehors de la Bible, mais plutôt ouvert et curieux. En plus des religions typiquement indiennes, les français peuvent découvrir qu’il y a dans le subcontinent près de 600 millions de musulmans et plus de 30 millions de chrétiens. Et constater que la manière dont ils vivent leur foi est très différente de l’islam arabe ou du christianisme européen (les chrétiens indiens sont des convertis surtout issus des hors castes et des peuples premiers).

Bref, tout un monde à découvrir !

3 Fédération védique française et Veda

La fédération védique a été créée en 2015 à l’initiative du directeur du centre védantique de Gretz, Swami Veetamohanada et avec le soutien de l’ambassade de l’Inde. Depuis, les huit associations qui la constituent construisent lentement une dynamique collective, car les bénévoles de chaque association sont souvent débordés. Le Rig Veda conseille en 10.191 : « Allez, ensemble concertez-vous, uni soit le conseil, uni soit l’assemblée…unie soit votre intention, unis soient vos cœurs, unis soient vos esprits, qu’il y ait bon accord entre vous ». Pour les associations de la fédération védique, seule une solide coopération leur donnera l’accès au média télévisuel qui facilitera grandement leurs efforts pour se faire connaître.

Mais une première difficulté est que le trait d’union entre elles, le Veda est très méconnu par le public et par les associations elles-mêmes. La maîtrise du sanscrit reste rare et l’analyse objective de l’ensemble de la sruti, les Ecritures sacrées est encore plus rare. Or si l’effort de mieux faire connaître la tradition védique porte ses fruits, il faudra nécessairement scruter les textes pour y distinguer ce qui provient de la Source universelle et est acceptable pour les français rationnels.

Car la culture indienne ne distingue pas clairement entre les mythes et l’histoire réelle analysée par des scientifiques. Par exemple quand l’ambassadrice de l’Inde auprès de l’Unesco déclare lors de la cérémonie inaugurale de la Fédération que les Védas sont « la plus ancienne des œuvres littéraires connues dans le monde », c’est inexact. Les Gathas en vieil avestique lui sont antérieurs comme l’épopée de Gilgamesh. Elle ajoute que, « rédigés en sanskrit archaïque, ces textes poétiques auraient été révélés il y a plusieurs millénaires à des sages indiens nommés rishis ».

Les scientifiques affirment aujourd’hui que tout part des dravidiens. Arrivés il y a plus de 40 000 ans en Inde, ils ont développé une grande civilisation orale. Ils furent écrasés militairement par les envahisseurs brahmanes venus des hauts plateaux avec leurs guerriers sans pitié et leurs prêtres sacrificateurs il y a environ 5000 ans, d’abord en Iran puis en Inde. Les dravidiens avaient déjà développé des sociétés et des villes très organisées dans les vallées de l’Indus et du Gange (post 6), mais ils étaient pacifiques. Les brahmanes les ont exterminés ou confinés au bas de l’échelle sociale.

Les rédacteurs de la Torah biblique vivaient dans un contexte de conquête guerrière d’un territoire cananéen marqué par les religions sacrificielles, on y trouve donc des passages sanglants qui choquent nos esprits modernes. De même, les rédacteurs du Rig Veda étaient placés dans un contexte de conquête guerrière de territoires fertiles habités par les dravidiens et apportaient avec eux le polythéisme et les religions sacrificielles caractéristiques des peuples nomades aryens des hauts plateaux asiatiques.

C’est pourquoi on trouve dans le Rig Veda (comme dans la Torah) la coexistence du sublime et du violent. Le sublime, c’est par exemple : « Ce qui est immortel dans les mortels est un Dieu, établi intérieurement comme une énergie se manifestant en nos divins pouvoirs » (Trad. Langlois, RV, 4,2,1). Ou (Trad. Renou, 10.71) : « Quand fut prononcée à l’origine la première Parole et qu’on donna des noms aux choses, ce qu’il y avait en celles-ci de meilleur, de pur, et qui était caché, se révéla avec amour. Quand les sages eurent formé la Parole en leur âmela beauté s’imprima sur leur langage. Ils suivaient les traces de la Parole, ils la trouvèrent qui était entrée dans les poètes. La ramenant ils la partagèrent de multiples façons ; les sept sages l’ont fait retentir ». Et (10.81) : « Ses yeux tournés partout, lorsque Dieu unique, Il crée le ciel et la terre, Il les soude ensemble ».

La violence, c’est le paganisme sacrificiel des prêtres au service des guerriers. En 4.24 le RV dit : « Quelle digne louange saura attirer par ici Indra, fils de la force pour qu’il me gratifie…on doit l’invoquer lors du massacre des ennemis, on doit le célébrer ». Et le RV 6/75 prône l’alliance entre guerriers et prêtres : « Puissions-nous par l’arc conquérir les vaches et le butin, gagnons par l’arc toutes les régions de l’espace…ils font un fracas violent lorsqu’ils s’élancent avec les chars, les chevaux aux sabots vigoureux, foulant au pied les ennemis, ils détruisent l’adversaire sans lâcher prisepères brahmanes qui honorez le soma, soyez-nous favorables… éloigné ou proche de nous, quiconque cherche à nous tuer, que les dieux tous ensemble le ruinent ! La formule est mon intime cuirasse. » L’Atharva Veda en rajoute en 13.1 : « Veuille Agni tout puissant faire périr tous mes adversaires, qu’il les tue, qu’il les brûle, périsse l’ennemi qui nous attaque ».

Il est évident que ces textes védiques violents sont obsolètes dans l’Inde moderne qui a d’abord rejeté les sacrifices sanglants, en particulier grâce à l’action de guides spirituels comme Mahavira, Bouddha ou Adi Sankara, puis a aboli la domination des castes brahmane et guerrière. Or la lecture de ces textes sans explications de leur origine composite ne peut que choquer les monothéistes et les esprits modernes. Il faut préparer les lecteurs occidentaux en distinguant les trois sources historiques amalgamées dans le Rig Veda : des inspirations dravidiennes transmises oralement sur plusieurs dizaines de milliers d’années, des écrits védiques en sanscrit des brahmanes sacrificateurs qui ont environ 3500 ans et les écoles philosophiques qui se développent à partir du premier millénaire comme le Vedanta.

Cette distinction est incontournable et ne semble pas explicitement identifiée par les membres de la fédération védique avec qui j’ai échangé. Aussi, il serait certainement judicieux de publier un joli livret de moins de 100 pages présentant le Rig Veda et sa très longue histoire, citant des versets choisis et introduisant les spiritualités de l’Inde. Son contenu pourrait dissiper les préjugés d’ignorances du public français liés aux accusations infondées de polythéisme et de risque de dérive sectaire qui ont trop longtemps dissuadé les personnes en recherche spirituelle de se rapprocher de l’une ou l’autres des associations de la FVF.

Il serait disponible dans des ashrams de l’association et en librairie, car on trouve très facilement la Bhagavad Gita, mais pas le Rig Veda. Je peux participer à sa rédaction en étant l’esprit français logique et relativement ignorant qui cherche à mieux comprendre les spiritualités de l’Inde et interviewe des spécialistes et de membres des associations, puis à convaincre un bon éditeur. Son titre pourrait être : Rig Veda ; traditions dravidiennes ; spiritualités du subcontinent indien.

4 Un dialogue interreligieux ou intertextuel ?

Plusieurs conférenciers du sommet du Vedanta se sont engagés dans le dialogue interreligieux, mais l’hindouisme est un acteur marginal en Europe. Ils ont fait état de la grande difficulté malgré tous leurs efforts à motiver des européens à venir les écouter ou partager des expériences en séminaires ou ashrams, ce que confirment toutes les statistiques. Par contre ceux qui font le premier pas ne le regrettent pas. Il y a un déficit de notoriété à surmonter que le bouddhisme ne subit pas.

Or ce que l’hindouisme peut transmettre au monde, seuls des esprits sectaires peuvent en refuser le bénéfice spirituel. Comme les techniques de méditation, longtemps affinées par les dravidiens, évoquées dans le Veda et synthétisées par Patanjali. Elles intègrent les postures, le contrôle du souffle, la prise de conscience des énergies et des chakras, la maîtrise de l’agitation du mental. De grands philosophes comme Ramanuja, mystique et théologien du Sud de l’Inde, au XIème siècle, sont trop peu connus, de même que de grands inspirés comme Ramana Maharishi ou Ma Ananda Moyi.

Ce qui est connu de l’hindouisme se limite généralement au yoga, aux arts, au folklore local et aux guides spirituels connus. L’Inde a une bonne image pour les français voyageurs et les esprits curieux. Mais certains gurus douteux ont laissé une mauvaise réputation dans le grand public et généré des préjugés qu’un livret et un créneau télévisuel pourraient dissiper. Depuis quelques décennies, l’évolution des rayons spiritualités des librairies prouve un intérêt croissant pour les religions non chrétiennes.

Avant la mode de l’orientalisme créée par la colonisation qui la confronta avec le monde musulman, la France avait déjà connu une période de Lumières. Des savants français comme Anquetil-Duperron, Langlois et Burnouf traduisirent et firent connaître les grands textes sacrés de l’Inde en Europe. C’est bien par la découverte des textes au moins autant que par celle des gurus ou les voyages en Inde que l’hindouisme s’est fait connaître ici.

Depuis, le vide spirituel ambiant en France a créé un appel d’air pour d’autres spiritualités. On estime en France à 350 000 le nombre de bouddhistes (majoritairement issus de l’immigration asiatique) et à 50 000 le nombre d’hindouistes (mais avec une proportion plus importante de personnes de culture européenne). Etablir un pont entre traditions spirituelles sur la base de leurs textes sacrés est une approche à tenter pour construire une plate-forme commune facilitant le rapprochement avec des croyants monothéistes et des agnostiques en recherche.

Le Rig Veda nous appelle les « enfants de l’immortalité » (10-13-1) et la perspective de résurrection est fondamentale dans les religions du Livre (post 36). De plus, la compatibilité du RV avec le bouddhisme et les textes sacrés du monothéisme est évidente en 10.82 : « L’œil du Père qui est sage dans sa pensée a créé ces deux mondes, le ciel et la terre prirent leur déploiement. Au nombril du non Né, l’Un est fixé, Lui sur lequel s’appuient toutes les créatures. Vous ne connaîtrez pas celui qui a créé ces mondes, quelque chose d’autre vous fait écran. Les récitateurs d’hymnes, ravisseurs de vie, marchent enveloppés de nuées et de bavardage ». Notons que ce verset étrille la fumée et les bavardages stériles répandus par les prêtres sacrificateurs.

Les bouddhistes ignorent souvent que Bouddha avait enseigné la non dualité, par exemple dans le Lankavatara sutra et qu’il a affirmé l’existence du Non Né, Non Devenu, Non Créé, Non Composé, sans développer dans son enseignement l’expérience qu’il en avait faite. C’est pourquoi le rapprochement intertextuel me parait beaucoup plus prometteur que le simple dialogue religieux où chacun discute courtoisement mais reste campé sur ses idées traditionnelles. Le mieux est de partir du Rig Veda.

5 Accéder au media télévisuel créera une notoriété immédiate

Une petite minorité d’athées français revendique une laïcité d’obscurantisme (post 55) face à toute manifestation publique d’une religion. Les guides spirituels sont traités de gurus, terme péjoratif pour la pensée commune française ; à l’inverse de ce qui se passe en Inde. La campagne antisecte contre les spiritualités minoritaires a mis à l’index des associations hindouistes bénéfiques pour leurs membres comme pour la société. Elle a laissé des traces. A l’autre bout du spectre du sectarisme, les islamistes sectaires, parfois criminels, sont une petite minorité d’ignorants qu’il est sage de ne pas provoquer.

La télévision française consacre le dimanche matin à des émissions évoquant les grandes religions. La sensibilité hindouiste est la seule à ne pas être présente. Or il y a plus d’un milliard de croyants se référant au Veda, un texte sacré largement inconnu dans la France moderne. A2 présente de 8h30 à 12h, dans l’ordre le bouddhisme (15’, sous l’égide de l’Union Bouddhiste de France), l’Islam (30’), le Judaïsme (15’), trois branches du christianisme (1h30) puis une messe catholique (1h).

Un créneau sur A2 assumé par la fédération védique pourrait dissiper les préjugés d’ignorance à l’encontre de l’hindouisme. Mais aussi donner envie aux personnes en recherche d’en savoir plus sur les spiritualités de l’Inde. C’est ce que Vivekananda avait réussi à faire d’abord aux USA, puis lors de ses séjours ultérieurs en Europe (post 9).

Elle pourrait s’appeler « spiritualités de l’Inde » et compléter judicieusement le panorama proposé aux téléspectateurs. Les personnes curieuses et ouvertes d’esprit y approfondiraient leurs connaissances des textes, pratiques et cultures reliées au Veda, ainsi que du contexte social des relations entre les religions et mouvements spirituels de l’Inde. Elle inclurait trois types de contenus maîtrisés par les associations de la fédération védique avec leurs sensibilités complémentaires :

–              Les arts indiens inspirés par la spiritualité : musique, poésie, danse, arts plastiques…

–              La vie et les enseignements laissés par les nobles guides spirituels historiques

–              Les textes sacrés qui nourrissent les spiritualités de l’Inde.

Le contenu artistique peut être présenté tel quel dans la grille du dimanche. Mais la présentation des guides spirituels et des textes sacrés nécessite quelques précautions pour bien s’intégrer à l’émission et au cadre mental des téléspectateurs français. Montrer la dévotion intense des adeptes d’un guru (même s’il dissuade le culte de sa personnalité) ou un culte collectif de pieux fidèles se prosternant devant des statues aurait un effet dissuasif et provoquerait les sectaires athées et islamistes.

Le titre proposé permet de ne pas se limiter à l’hindouisme et de présenter aussi l’enseignement originel et la vie de Bouddha dans la vallée du Gange. Ainsi que l’islam et le christianisme tels qu’ils sont vécus en Inde.

6 Cadrage de l’émission

Dans une France qui se méfie de tous les clergés, il est souhaitable de faire une présentation laïque des spiritualités de l’Inde dans une perspective universelle. Même si les pasteurs et guides spirituels des religions font un travail utile comme organiser le culte réclamé par leurs fidèles, répondre aux besoins des souffrants ou modérer les excès des croyants sectaires de leur obédience. La spiritualité hindoue peut se présenter comme une voie de pratique spirituelle où les guides spirituels n’ont pas de magistère officiel et sont reconnus par leur rayonnement ou leur savoir, en phase avec l’islam qui est sans prêtres et le judaïsme où les saducéens ont été remplacés par des rabbins formés et choisis par leurs communautés. En contraste avec le bouddhisme de monastères et le christianisme de prêtres et pasteurs présentés à A2.

Il faut aussi dissiper la méconnaissance condescendante de trop de croyants des religions du Livre qui voient en l’hindouisme un polythéisme arriéré. Nos frères hindouistes adorent le Créateur sous de multiples formes, c’est leur chemin ascendant. Par contre pour dépasser la simple tolérance interreligieuse avec les religions du Livre et se rapprocher d’un amour fraternel véritable, il faut plonger dans les textes sacrés et en rechercher l’unité fondamentale.

En synergie avec les enseignements des guides spirituels, les textes sacrés doivent être replacés dans le contexte du subcontinent et de sa grande diversité religieuse. Dans une émission grand public, il faut les présenter avec une certaine neutralité, sans chercher à prouver la supériorité des textes védiques par rapport à d’autres textes sacrés. Des invités musulmans ou chrétiens originaires du subcontinent pourront participer dans un esprit non sectaire à une émission de la fédération védique.

Pour retrouver la Parole révélée ou inspirée à la source et faciliter le rapprochement avec les autres textes sacrés, il est préférable de se concentrer sur le Veda des rishis dravidiens. Afin de travailler sur les textes sacrés sans prendre parti entre les branches religieuses et lignées de gurus.

Par exemple, il y a dans le Rig Veda des récits de la Création assez énigmatiques, mais qui rejoignent ceux de la Genèse biblique. En 10.129 : « Il n’y avait pas l’être, il n’y avait pas le non-être en ce temps. Il n’y avait ni l’espace, ni le firmament au-delà. Quel était le contenu ? Où était-ce ? Sous la garde de Qui ? Qu’était l’eau profonde, l’eau sans fond ? Ni la mort, ni la non-mort n’étaient en ce temps, Point de signe distinguant la nuit du jour. L’Un respirait sans souffle mû de soi-même : Rien d’autre n’existait par ailleurs. A l’origine des ténèbres couvraient des ténèbres, tout ce qu’on voit n’était qu’onde indistincte. Enfermé dans le Vide, le Devenant, l’Un prit alors naissance par le pouvoir de la chaleur. D’abord se développa le Désir, qui fut le premier germe de la pensée. Cherchant avec réflexion dans leurs âmes, les sages trouvèrent dans le non-être le lien de l’être ».

Les divisions religieuses restent une cause de violence partout, mais notre pays offre un contexte favorable à la fraternisation entre croyants. Nous n’avons plus de clergés assez influents pour instrumentaliser et attiser les préjugés religieux et notre pouvoir politique veille à la laïcité. La violence interreligieuse en Inde entre hindous et musulmans ou dans les pays musulmans entre sunnites et chiites ne peut pas prendre racine ici. La réflexion sur les textes sacrés et la remise en cause des interprétations humaines n’est pas tabou. Au contraire, elle peut tracer une voie d’apaisement vers la connaissance mutuelle.

Le Coran dit en (5/48) : « A chacun d’entre vous, Nous avons indiqué une voie générale et une voie spécifique. Et si Dieu l’avait voulu, Il aurait fait de vous une seule communauté (umma). Il vous éprouve dans vos dons, rivalisez donc en bonnes œuvres. Vous retournerez tous vers Dieu, et Il résoudra vos divergences » ; et en 49/13 : « Ô hommes ! Nous vous créons d’un mâle et d’une femelle et vous avons constitué en peuples et tribus afin que vous vous connaissiez les uns les autres. Devant Dieu, le plus noble d’entre vous est le plus pieux, car Dieu sait, il est renseigné ».

Un dialogue constructif en France entre des musulmans ouverts, des agnostiques en recherche et des croyants sensibles aux spiritualités de l’Inde peut participer à pacifier les relations entre les grandes religions du monde. La France n’a plus le rayonnement universel de l’époque des Lumières, mais elle peut soutenir une dynamique d’interconnaissance mutuelle entre croyants. C’est un argument qui devrait toucher les régulateurs de la télévision publique.

7 Plan d’action

La première étape du projet passe par les associations de la fédération védique : obtenir un consensus assez large pour y voir une perspective enthousiasmante autant que réaliste. Le premier obstacle mental sera le manque de ressources disponibles en interne. Mais il ne faut pas les sous-estimer comme le prouve le succès du Sommet du Vedanta dont plusieurs interventions pourraient être diffusées telles quelles dans l’émission.

La deuxième étape qui pourrait prendre plusieurs mois serait de travailler à la rédaction du livret de présentation du Rig Veda pour publication au printemps 2025 (?)

La troisième étape serait de tenir à Gretz un sommet européen du Rig Veda (été 2025) qui nous permettra de préciser les idées et pratiques qui unissent les membres de la FVF afin de mettre l’emphase sur elles dans notre communications publique de premier impact. Ensuite les personnes intéressées pourront aller plus loin avec une association qui a leur préférence.

La quatrième étape est la préparation à l’entrée dans le monde télévisuel, d’abord rechercher et faire converger les ressources humaines internes et externes mobilisables pour une série d’émissions. Il faut évidemment ne pas se limiter à la France. Il peut y avoir un effet boule de neige si on écarte le pessimisme face à ce projet car les associations européennes, en y réfléchissant, prendront conscience de la synergie avec leurs propres objectifs de consolider leur base d’adhérents.

A partir de ce recensement progressif des ressources mobilisables, il sera possible de définir un canevas pour la série d’émissions, au moins pour la première année, avec les thèmes et formats qui seront mobilisés (interviews, reportages, lectures, dialogues…). Le projet deviendra alors communicable en externe, soit en se concertant avec l’ambassade de l’Inde qui pourra facilement intervenir pour aller plus loin, soit en se concertant avec des responsables de la programmation. Je ne suis pas journaliste, mais les attachés de presse savent comment procéder.

Après, il s’agira de négocier pour contourner les obstacles qui se manifesteront. On peut espérer un début de diffusion fin 2025 ou 2026 (?). Il vaut mieux prendre son temps et présenter d’emblée un programme attrayant pour tous les téléspectateurs, surtout par comparaison avec certaines émissions religieuses actuelles qui sont, il faut bien l’avouer, ennuyeuses sauf peut-être pour leurs fidèles pratiquants.