La réincarnation est devenue à la mode en Occident et paraît plus sérieuse que la Résurrection enseigné par les prophètes du monothéisme. Tous les hommes se posent des questions sur leur destinée après la mort. La science vénérée par les sceptiques n’apporte aucune réponse. Beaucoup de sceptiques tournent en dérision les perspectives des croyants. Ils oublient que la moitié de l’humanité croit à la Résurrection et ne sont pas tous des imbéciles gobant un conte de fées.

Les analyses scientifiques ont leur utilité et leurs limites. Elles ne peuvent ni prouver ni nier ce que dit la Parole enseignée par le Créateur à Ses Messagers au fil de la courte histoire humaine. La science estime à quelques milliards d’années les premières formes de vie sur terre, à quelques millions celle du genre homo, et à environ 50 000 ans l’apparition des homos sapiens actuels, ce que confirme le Coran (70/4).

Pour réfléchir à ce qui se passe après notre mort, nous allons travailler sur ce que nous pouvons appeler des textes sacrés, vénérés comme tels par beaucoup de nos contemporains, même si les textes dont nous disposons aujourd’hui ont été plus ou moins altérés et mélangés de livres d’homme. Ils comportent à la fois des Révélations du Créateur, des spéculations hasardeuses de cerveaux humains et des altérations des scribes et théologiens au service des préjugés religieux et des pouvoirs qui tirent profit de l’ignorance et de la division des hommes.

Donc, résurrection ou réincarnations ?

1 Les temps adamiques, éternité, intemporalité : une indicible expérience

D’après les analyses génétiques les plus récentes, l’humanité dans sa grande diversité d’apparence, descendrait d’un petit groupe d’homo sapiens, quelques centaines peut-être, dont le berceau de vie était au Moyen Orient. Le genre homo lui-même est apparu dans son berceau africain après une lente évolution biologique, un développement de son volume crânien. Plusieurs espèces du genre homo ont coexisté quelque temps, la plus connue en dehors de l’homme moderne est l’homme de Neandertal apparu vers – 150 000 et disparu vers – 30 000 avant J.C. D’après la Genèse chapitre 6, les fils de Dieu vinrent trouver des filles d’homme et eurent d’elles des enfants. La génétique confirme que nous aurions environ 2% de gênes provenant des hommes de Neandertal. La Genèse parle aussi de géants, des héros d’autrefois.

Les créatures adamiques différaient des Neandertal par le Souffle que le Créateur leur insuffla pour qu’ils soient à Son Image et à Sa Ressemblance, restent un homo sapiens au plan biologique mais deviennent un enfant de Dieu au plan spirituel. Adam dialoguait avec Dieu directement dans la fraîcheur du soir et avait donc la connaissance directe de la Parole : les anges se sont prosternés devant lui à la demande du Créateur. Adam disposait de plusieurs dons divins, en particulier la liberté qui permettait de choisir une autre voie que la Voie de l’Amour que le Créateur avait souhaité pour Eve et lui.

C’est Adam « qui a choisi d’être maître de la terre et de M’en payer tribut en passant par les plaies de Job et par la fosse, qui a choisi d’être maître des arbres… qui, de compagnon d’Eve, a choisi de devenir son maître, lui imposant ses ruts… qui a choisi d’être maître des pierres qu’il a érigées pour s’abriter, vivant ou mort, dans son humidité mouvante et tiède comme dans le vêtement d’os secs et froids qu’il a voulu pour m’attendre au creux de la terre » (Parole de 1974, 2/1-5). Elle précise qu’Elie est le premier échappé au vœu d’Adam, son père, de M’attendre en terre, renonçant à l’héritage de la terre, renonçant à M’en payer tribut, échappant à la fosse.

Ainsi, avant le choix d’Adam, les créatures adamiques ne connaissaient pas la mort grâce au lien étroit qu’elles avaient avec leur Créateur, la Source de Vie qui est en dehors du temps. La mort n’existait pas pour eux, c’est une expérience impartageable car ils n’étaient pas dans la même temporalité que nous. Le vague souvenir de cette période très lointaine est peut-être resté dans la mémoire de certains descendants d’Adam avec cette nostalgie de l’immortalité à retrouver ?

2 L’humanité actuelle et les migrations post-adamiques

Nos ancêtres, les créatures adamiques devenues mortelles ont progressivement dominé la planète en migrant du berceau mésopotamien dans toutes les directions. Les populations humaines résultent de vagues successives de migration d’homos sapiens de types physiques déjà bien différenciés. La plus ancienne, de type aborigène, arriva en Inde vers – 45 000. Certains restèrent sur place, d’autres continuèrent vers l’Asie du Sud-Est avant d’aller jusqu’en Australie. La migration suivante était de type malais, elle s’est mélangée avec les aborigènes en Inde pour former les peuples dit dravidiens qui ont développé une culture et des pratiques religieuses qui préexistaient au Veda. La migration du type caucasien, est beaucoup plus tardive, ils sont passés par les régions montagneuses du Caucase avant de parvenir en Inde au deuxième millénaire avant J.C. Ce sont eux qui ont apporté le Veda auquel se sont progressivement rallié les populations dravidiennes. L’autre grande vague de migration est le type sino-mongolien qui a suivi une route plus au Nord avant de parvenir en Chine, puis en Amérique par le détroit de Behring.

Toute notre humanité d’apparence aussi diverse a donc les mêmes lointains ancêtres qui avaient un lien direct avec le Créateur et Sa Parole, mais au fil des générations, au hasard des migrations, ils ont oublié cette Parole. Ils ont constitué des superstitions avec des sorciers et des chamanes prétendant être en contact avec le monde des esprits, puis des religions humaines fondées sur d’hasardeuses spéculations. Le Créateur a décidé de leur envoyer progressivement des Messagers pour leur rappeler Sa Parole d’Amour et Sa Promesse de Résurrection.

De ces Messagers de la période post adamique, le plus ancien dont l’histoire a gardé la trace est Noé dont le peuple vivait quelque part en Iraq vers le cinquième millénaire av. J.C (?). C’est l’époque du début des cités sumériennes et de celle de l’Indus, et on trouve une narration du déluge dans l’épopée de Gilgamesh, daté de 2650 av. J. C. Sa descendance inclut les sémites et les indo-européens, mais certainement pas les aborigènes, les malais ou les sino-mongoliens qui ont vécu une histoire spirituelle différente et furent exposés tardivement aux Révélations venues du Moyen Orient par Zarathoustra, Jésus et Muhammad en particulier.

Le Rig Veda porte peut-être la trace, comme la Bible, de ce souvenir de l’immortalité, dans son mantra 10-13-1 il s’adresse à l’humanité toute entière en l’appelant « enfants de l’immortalité » : Shrunvantu vishve amritsya putraha. Il parle à plusieurs reprises de la recherche de l’immortalité mais sans en donner la clef.

3 Le Jour de la Résurrection dans les Révélations

La victoire sur la mort physique avec l’annonce d’un Jour de la Résurrection de la chair apparaît dans la Parole Révélée progressivement mais de manière de plus en plus nette. On trouve dans l’Avesta (Yasht 19/89) la notion de Résurrection qui surviendrait à la fin des temps avec l’avènement du « Saoshyant ». Dans les Ecritures sémitiques, elle n’est pas évoquée à l’époque de Noé ou d’Abraham, elle apparait avec Isaïe puis Ezéchiel (voir post 26), elle est affirmée et prouvée par Jésus fils de Marie, et c’est un thème récurrent du Coran.

Voici ce que dit le Coran, sourate 75, la résurrection (traduction Grosjean) : « Non, J’en jure par l’âme qui ne cesse ses reproches. Est- ce que l’homme pense que nous ne rassemblerons pas ses ossements ? Certes si ! Et nous pouvons remettre en ordre ses phalanges. Mais l’homme veut rester pervers. Il demande : A quand le Jour de la Résurrection ? Quand les yeux seront éblouis… Ce Jour-là, tout retournera vers ton Seigneur, l’homme sera informé de ce qu’il a fait et omis. Mieux, l’homme se verra lui-même même s’il donne des excuses. »

La Parole de 1974 confirme : « Alors ce sera Mon Jour. D’un Geste J’arrêterai l’astre sous vos pieds ; il n’y aura plus ni jour ni nuit, mais Ma Lumière couvrira tout sans cesse ; Je descendrai visiter Mes Granges, J’étendrai Mes deux Bras sur l’univers et il criera sa liesse, il tremblera de plaisir, les étoiles s’allumeront comme des flammes, brûlant et dévorant les restes de broussailles et d’épines. Je M’inclinerai vers les fosses, les vases funéraires, les mers, les os et les poussières frémiront sous la caresse des âmes descendues avec Moi des Hauteurs Saintes, ils s’assembleront et se relèveront. »

Le Jour de la Résurrection n’est pas une menace de punition d’un Créateur infiniment aimant, pardonnant et patient, mais il n’interviendra au terme d’une lente transfiguration que l’humanité est libre de faire ou de retarder. C’est une Promesse réaffirmée par les messagers successifs envoyés par YHWH.

4 La Résurrection avant le Jour, l’exemple historique de Jésus fils de Marie

Pour les disciples de Jésus qui en avaient été témoins et pour les chrétiens actuels, la double affirmation de la Résurrection de Jésus dans une chair physique mais immortelle et de la Résurrection au Jour est fondamentale dans leur foi. Il y a eu d’autres témoignages d’une apparition non fantomatique du charpentier de Nazareth dans son corps transfiguré, comme celle du témoin d’Arès en 1974 qui affirme que Jésus a posé sa main bien charnelle sur ses lèvres pour l’oindre comme messager.

Pour les musulmans (voir post 8), la foi dans le Jour de la Résurrection ne fait aucun doute, mais beaucoup pensent que Jésus n’a pas été ressuscité après sa mort par crucifixion en se référant au verset 4/157 : « Nous avons vraiment tué le Christ, Jésus, fils de Marie, le Messager de Dieu”. Or, ils ne l’ont ni tué ni « crucifié, mais ils n’ont vécu qu’une illusion ! Et ceux qui ont discuté sur son sujet sont vraiment dans l’incertitude : ils n’en ont aucune connaissance certaine, ils ne font que suivre des conjectures et ils ne l’ont pas tué avec certitude, mais Dieu l’a élevé vers Lui ». Ce texte est obscur, mais à la Lumière des événements d’Arès, il devient clair : ils ont voulu tuer le Christ, le Messager de Dieu, mais ils n’ont tué que l’homme Jésus. L’hypothèse que les soldats romains auraient tué une autre victime n’est pas crédible car Jésus enseignait avec autorité dans le Temple de Jérusalem, impossible de se tromper d’homme !

Jamais ses apôtres qui s’étaient lâchement enfuis n’auraient trouvé le courage de témoigner et de braver la mort s’ils n’avaient pas constaté de leurs yeux (et de la main pour l’apôtre Thomas) cet inattendu : la promesse accomplie de la résurrection de la chair. Ainsi, la perspective de la Résurrection de la chair, hors de portée des sciences expérimentales, affirmée par les Ecritures et prouvée par Jésus fils de Marie, est une solide espérance pour un très grand nombre de croyants. Ce n’est pas une simple idée qui les rassure face à la peur de la mort.

5 Hypothèses de réincarnations et leurs apparitions dans les textes sacrés

Pendant des dizaines de milliers d’années, l’humanité post adamique va errer dans sa volonté de dominer la terre, de se multiplier en nombre, de conquérir de nouveaux espaces, portée par ses guerriers et ses sorciers. Elle va se fragmenter en nombreux groupes qui se sédentariseront provisoirement avant d’être chassés par d’autres ou d’explorer de nouveaux territoires. Le matérialisme et la superstition vont dominer leurs pensées et leurs espérances. La connaissance du Dieu Créateur unique va s’effacer au profit de panthéismes ou polythéismes, des dieux à amadouer par des sacrifices organisés par des prêtres.

Dans l’ignorance de la Parole, des idées de réincarnation vont logiquement germer car leurs sorciers et chamanes s’occupent des mondes des esprits, ceux des animaux qu’ils chassent, ceux des mauvais esprits qui les menacent. Ils vont croire et faire croire qu’ils communiquent avec des esprits, en particulier ceux des ancêtres qu’ils pleurent ou vénèrent. Ainsi la croyance va se répandre qu’après la mort, l’homme va dans un monde des esprits et qu’il pourrait ensuite revenir sur terre.

Des idées de réincarnation sous diverses formes ont été trouvées dans beaucoup de peuplades proches de la nature avec une culture peu élaborée par l’absence d’écriture. En Afrique subsaharienne, l’idée qu’un défunt quitte son corps pour retrouver un autre état d’être, une autre forme, en tant que végétal ou animal/humain, fait partie intégrante de la spiritualité originelle des religions traditionnelles africaines. En Inde, les dravidiens développèrent leur culture en relative autarcie pendant des dizaines de milliers d’années. Ils ont développé la pratique du yoga, la médecine ayurvédique et des arts sophistiqués, mais nous ne connaissons pas avec certitude leurs idées sur l’au-delà.

Dans les cultures plus élaborées comme le monde grec fleurissent aussi à partir du sixième siècle avant J.C. des doctrines de la réincarnation et de la métempsycose : l’âme poursuit son évolution d’existence en existence humaine (réincarnation), et peut éventuellement s’incarner dans un animal ou un végétal (métempsycose). Pythagore ou Platon l’évoquent.

Il y a donc deux strates de croyance en la réincarnation, une primitive qui envisage le retour sur terre des esprits des morts, une autre plus sophistiquée qui parle d’une âme immortelle qui migre de corps en corps et qui diffuse à partir du cinquième siècle avant J.C. sans qu’on puisse définir précisément son origine géographique, Inde, Grèce, Egypte ? Les idées et croyances traditionnelles seront marginalisées par les grands empires et les religions officielles et ne laisseront pas de textes largement reconnus comme sacrés.

6 La réincarnation promue par les brahmanes et ses zélateurs modernes

L’idée de réincarnation ne fait partie ni de la révélation védique originale, ni des concepts développés par les scribes brahmanes. On trouve dans trois upanisads l’histoire du brahmane érudit Uddalaka à qui un roi enseigne la doctrine de la réincarnation et de la rétribution karmique. De plus le volumineux commentaire d’herméneutique de Sabara, écrit vers + 500, une référence dans la philosophie brahmanique ne comporte aucune référence à cette doctrine considérée comme étrangère et hétérodoxe par les brahmanes traditionnels. Mais ils finirent par admettre que la réincarnation et la rétribution karmique justifiaient la logique de caste qui les plaçait au sommet de la société et dissuadait les basses castes de changer l’ordre social établi à leur avantage. L’idée de caste est étrangère au Rig Véda qui dit en 5-60-5 : « Tous les hommes sont frères ; personne n’est grand, personne n’est petit. Tous sont égaux », ce qui n’arrange pas leurs ambitions de prêtres.

Les brahmanes vont d’abord noyer les Vedas d’écrits de leurs crus et les intégrer dans un ensemble de textes dit sacrés, avec les Brāhmaṇa, les Āraṇyaka puis les Upaniṣad, dont les parties les plus récentes dateraient du cinquième siècle av. J.-C. C’est la transition de l’Inde védique vers l’Inde brahmanique qui va figer au sommet de la société les érudits du sanscrit. Puis l’irruption des enseignements de Bouddha et Mahâvîra va déstabiliser la situation des brahamanes dont certains vont se rallier aux nouvelles idées qui marqueront l’histoire de l’Inde. Mahâvîra enseignait probablement la réincarnation, car les jaïns ses disciples l’intègrent dans leur foi, mais ses enseignements originaux ont disparu.

En réaction aux menaces des nouvelles idées et à l’émergence des empires maurya puis grecs, et au développement des ordres non védiques et des enseignements des ascètes itinérants, des érudits brahmanes vont composer au fil des siècles des textes mythico-littéraires comme le Ramayana et le Mahabharata incorporant des éléments de la culture dravidienne. Ces textes marquent la transition de l’Inde brahmanique à l’Inde hindouiste. Ils connaîtront un grand succès populaire et la doctrine de la réincarnation va y être incorporée, en particulier dans la Bhagavad-Gita, un texte introduit tardivement dans le Mahabharata. Cette doctrine sera ensuite officiellement intronisée dans la religion, puisque la cour suprême en 1966 inclura dans sa définition de l’hindouisme « l’acceptation de la croyance dans la renaissance et la préexistence des êtres ».

Après le choc brutal de l’arrivée de l’Islam puis du colonialisme anglais, les brahmanes vont perdre leur emprise sur la société, mais leurs idées vont perdurer. Ainsi, dans l’Inde moderne, les brahmanes gardent le rôle lié aux cultes hindouistes et leurs fidèles les rémunèrent grassement pour organiser des cérémonies comme les prières (puja) ou les mariages. C’est un pouvoir de fait consenti par la tradition, il n’est pas imposé car l’Inde est un état laïc. Mais dans la pensée populaire hindouiste, la doctrine de la réincarnation que les brahmanes ont habilement promue est restée centrale et il en est de même dans la pensée populaire bouddhiste, probablement sous l’influence des brahmanes avant qu’ils ne réussissent à marginaliser les bouddhistes dans son pays d’origine.

Certains mouvements gnostiques intègrent la doctrine de la réincarnation, car la gnose (connaissance) permettrait à l’âme de se libérer de son emprisonnement dans la matière et des renaissances multiples. On la retrouve aussi dans divers cercles spirites qui flattent l’orgueil de leurs membres qui s’attribuent de prestigieuses vies antérieures ou une capacité à communiquer avec les esprits. Elle offre aussi une explication à certaines expériences individuelles de projection de la pensée hors du temps dans des situations perçues comme un passé réel ou un avenir possible. La personne s’identifie sincèrement à un des personnages des scènes qu’ils perçoivent. Mais il y a d’autres explications de ces expériences subjectives.

Notons aussi la mouvance du New Age, souvent réincarnationniste, ou des tentatives de prouver la réincarnation comme celle du psychiatre américain Stevenson qui a connu une certaine audience sans convaincre les scientifiques. Les livres qui promeuvent la réincarnation sont très nombreux dans les rayons ésotériques.

7 Bouddha, impermanence du moi et réincarnation

Nous avons déjà évoqué dans les posts 8 et 17 l’incompatibilité entre l’idée d’une réincarnation d’une vie charnelle à l’autre d’un moi permanent, pourtant cette idée est largement répandue dans les milieux bouddhistes. Pourquoi ?

Quand Bouddha enseignait, il a été confronté comme Mahavira à une religion indienne sous l’emprise des brahmanes où la hiérarchie des castes, justifiée par les mérites des vies passées, était solidement ancrée. Le mot sanscrit utilisé par Bouddha, punarbhava, était compris par les brahmanes comme réincarnation, mais il peut se traduire aussi par renaissance ou vie nouvelle, d’où la confusion dans l’esprit des réincarnationnistes. Car Bouddha écarte la notion d’atman, d’âme immortelle qui transmigre.

A la place d’une âme ou esprit et d’un corps, Bouddha propose de distinguer cinq agrégats d’attachement, les skandhas. L’individu est conditionné à des phénomènes éphémères, impersonnels et insatisfaisants qu’il prend pour un moi, et le conduisent à s’attacher à cette idée d’égo, là où il n’y a qu’une coproduction conditionnée de phénomènes dont l’impermanence produit la souffrance. La souffrance ainsi se perpétue de vie en vie ; mais comme l’explique Buddhaghosa, chaque vie ne dure, en réalité, qu’un seul instant.

Comme Mahavira, il a écarté cette logique de caste, mais il est allé plus loin par son analyse de l’attachement au moi impermanent comme cause de la souffrance. L’impermanence du moi avait pour conséquence l’effondrement de la théorie de la réincarnation fondée sur l’existence d’un atman permanent, car qui passerait de corps en corps ? Les brahmanes qui tenaient à défendre le statu quo avaient bien compris le danger. Ils ont donc veillé à réintroduire l’idée de réincarnation chez les disciples locaux de Bouddha qui n’avaient pas tous bien compris la subtilité du Dharma.

Dans le sonadanda sutra, Siddhârta échange avec un brahmane qui lui explique que le premier critère pour être un vrai brahmane est la bonne naissance de ses deux parents, puis la connaissance des formules rituelles et des Vedas. Bouddha lui explique alors que la noblesse vient de la vertu et de la sagesse et non de la naissance. Il n’entre pas dans un débat intellectuel, il ne s’attaque pas directement au principe ou à l’utilité d’une caste héréditaire de prêtres, mais il questionne habilement sa pertinence et son fonctionnement.

Dans le sandhinirmocanasutra, Bouddha parle de ceux qui se plaisent à débattre et discuter à partir de leur vieille et tenace croyance au « moi » et sont incapables d’imaginer ou d’apprécier l’absence de ferme croyance au « mien ». Ces intellectuels argumentateurs s’avèrent incapables de dépasser les arguties conceptuelles. Il dit aussi : « la théorie suivant laquelle le moi existe est vaine et fausse, mais la théorie suivant laquelle le moi n’existe pas est vaine et fausse, la Vérité est entre les deux, c’est le juste milieu que le Bouddha enseigne ». Ceci permet de dépasser la pensée dualiste de l’intellect logique très sollicité en Occident. Il invite à partir d’un point de vue différent et à s’observer soi-même attentivement.

Dans le bouddhisme tibétain, le concept de tulku, censé être une réincarnation d’un maître, aboutit à un choix judicieux des futurs supérieurs des monastères : de jeunes enfants sont présélectionnés, mis en présence d’objets ayant appartenu au maître qu’ils choisiront en fonction de leur sensibilité au rayonnement spirituel de ces objets. Le tulku retenu entrera alors au monastère pour y suivre une longue formation spirituelle par un lama tuteur. Quand leur formation est achevée, ils sont intronisés dans leur fonction.
J’ai pu assister à une telle intronisation au monastère d’Hémis, au Laddakh, d’un Rinpoché de 17 ans, censé être une réincarnation de Naropa, un maître reconnu du 11ème siècle. Quand on lui a passé le collier d’ossements qui lui appartenait, un arc en ciel circulaire est apparu soudainement, phénomène incompréhensible dans un endroit aussi sec. Quelle que soit la personne vivante ou défunte qui a pu faire apparaître ce halo (l’arc en ciel faisait partie des attributs de Naropa), il a eu pour conséquence une solide confiance du peuple présent pour ce nouveau Rinpoché.

La capacité de certains yogis ou grands spirituels à mobiliser des pouvoirs inhabituels, les siddhis, est assez largement attestée, mais ils mettent toujours en garde contre leur mauvaise utilisation. Dans cette situation, l’objectif noble était de renforcer la transmission du Dharma dans un contexte de plus en plus déspiritualisé. Mais cela ne prouve en rien la réalité d’un phénomène de réincarnation, ce que l’universitaire Serge-Christophe Kolm avait découvert dans ses études sur le bouddhisme tibétain. Il y a un niveau de croyance populaire dans lequel la réincarnation est tenue pour une réalité du monde physique, alors que pour les niveaux plus élevés du bouddhisme, ce concept n’est qu’une parabole utile pour accompagner la foi populaire. Ainsi, à la source de l’enseignement de Bouddha, on ne trouve ni résurrection, ni réincarnation, mais une pratique, une autodiscipline spirituelle qui conduit à la libération de l’attachement à l’impermanent.

« Le Bouddha comprend ceux qui soutiennent la théorie selon laquelle on atteint la délivrance dans l’état visible, mais il ne s’attache pas à cette compréhension. Il a compris réellement l’émergence et la disparition des sensations ainsi que leur saveur et leur désavantage et le moyen d’y échapper, le Bouddha est libre sans reste de substrats. Ses propos sont profonds, difficiles à voir, difficiles à comprendre, sereins, supérieurs, inaccessibles au raisonnement, subtils, compréhensibles par les sages eux-mêmes. Il les fait connaître au monde après les avoir appris par ses propres connaissances spécifiques. » (Brahmajalasutra).

8 La Parole de 1974-1977 : l’homme est corps esprit et âme, des temporalités différentes

Nos langues ont des mots différents pour esprit et âme, spirit and soul, Seele und Geist, mais les langues sémitiques ne font pas la distinction. De plus, le sens donné au mot âme varie considérablement.

La Parole de 1974-1977 nous livre un langage qui nous donnera l’intelligence spirituelle, et c’est le cas pour le mot âme : « L’âme est le regard, la main, la gorge, l’estomac du spectre ; par elle Je peux le réchauffer de l’éclat de Ma Gloire, Je peux le conduire vers les magnificences infinies, Je peux entendre sa louange et sa conversation, Je peux le nourrir à jamais. Sans l’âme, le spectre erre tourmenté, aveugle, affamé… Ne tremble pas à ma Voix, tremble d’anéantir ton âme » (4/6-8). Elle ajoute en 17/7 : « L’homme est de chair, d’esprit et d’âme, les trois seront réunis en Mon Jour ».

Ce qui éclaire la question du destin de l’homme après la mort de la chair qui nous attend tous : elle est provisoire jusqu’au Jour de la Résurrection, mais entre la mort individuelle et ce Jour, nous ne sommes plus qu’esprit et âme. Et si nous n’avons pas soigné notre âme au point de l’anéantir, nous devenons un spectre. Destin terrible mais passager qui ne résulte pas d’une punition d’un Créateur qui nous aime et n’est pas un juge, mais du libre choix par l’homme de sa vie sur terre. Car Il maintient Sa décision de préserver notre liberté humaine au risque du mal, ce mauvais choix possible pour Ses créatures humaines qui doivent en assumer les conséquences jusqu’au Jour « où chacun verra alors ce que Je ferai ».

En révélant le sens à donner au mot âme, la Parole qui me guide ne me livre pas un concept intellectuel, elle m’aide à distinguer dans ma propre expérience ce qui se passe en moi. Or je constate que si mon corps et mon esprit vieillissent et se fatiguent, ce n’est pas le cas de mon âme que je sens toujours fraîche.

Dieu Seul est hors du temps mais nos trois composantes ne sont pas dans la même temporalité.

Le corps, la chair, est pesante. Elle vit et dépérit selon un temps linéaire : je subis ma biologie, les hasards de ma naissance et des accidents. J’en prends soin, mais je dois accepter mon corps charnel tel qu’il est avec ses contraintes.

L’esprit où se développent mon intellect et mes sentiments, bien que lié à l’état de la chair, est beaucoup plus agité, rapide, comme on le constate dans le décalage entre l’idée de bouger un muscle et sa réalisation, ou plus encore dans les rêves, et davantage pour ceux qui ont revécu en quelques instants toute leur vie (expérience de mort imminente). Je peux discipliner mon esprit tenté par le mal plus facilement que mon corps.

L’âme est calme, noble, avec une aspiration puissante au Bien, un dégout du mensonge et du mal, elle prend le temps d’observer, de décider. C’est elle le pilote de ma vie. Je la construis, j’en prends grand soin, à l’écoute de la Parole : « Tu chauffes en toi le Fond alors l’ha (l’âme) caille, plus léger rien ». Oui, je dois chauffer mon Fond au feu de l’Amour de Dieu et de l’humanité pour que mon âme prenne sa force ascensionnelle et élève mon esprit au jour de ma mort. C’est aussi la clef d’un bonheur durable : avoir la conscience tranquille, quelle sérénité !

Je ne veux pas finir en spectre glacé, je veux être le « charpentier à l’écoute du Maître (Dieu), qui fournit l’effort pour achever son œuvre, pour que le Roi lui garde son âme pour voile, pour qu’il rejoigne la Flotte Céleste, laissant ses os blanchis en attente sur le rivage » (17/4).

Grâce à la Parole qui ne se divise ni ne se tait, j’ai des convictions personnelles solides sur cette question de ce qui nous attend après la mort physique, mais en faire l’objet de débats contradictoires ne tend pas à édification pour reprendre une expression de Bouddha. Ces convictions guident ma pratique spirituelle.

Par contre, si j’ai développé ce sujet, c’est parce que ce sera un sujet de dissension majeur quand le monde musulman et le monde hindouiste voudront se rapprocher pour faire entre eux la paix de la connaissance.

Je termine ce post par deux citations de gurus hindouistes réputés :

Ram Chandra : « la question des vies passées et futures n’est pas pertinente pour notre réalisation spirituelle. Personnellement, je peux croire dans les vies passées et futures comme me l’a enseigné ma religion de naissance. Mais que d’autres personnes aient cette même croyance n’est pas utile pour la pratique spirituelle. Ce qui importe c’est atteindre le but ici et maintenant »

Ramana Maharshi : « La réincarnation n’existe que dans les limites de votre ignorance. Il n’y a pas de réincarnation, il n’y en a jamais eu et il n’y en aura jamais. Voilà la vérité. L’ego apparaît, disparaît. Il est éphémère, transitoire, tandis que le Soi demeure permanent. Bien qu’en vérité vous soyez effectivement le Soi, vous persistez à identifier le Soi réel avec le faux Soi, l’ego. »