Commençons par un peu d’humour avec la formule d’Oscar Wilde : « la démocratie, c’est l’oppression du peuple, par le peuple et pour le peuple ».

Lancer deux référendums nationaux est dans les prérogatives du président français réélu et peuvent donc être prises avant 2027. Ce post parcourt succinctement l’évolution du référendum dans les pays qui l’ont pratiqué. L’analyse est indissociable du contexte spécifique de la démocratie dans les pays concernés. Il se focalisera ensuite sur le cas particulier de la France, une pseudo démocratie (post 53).

1 La crise de la démocratie représentative

Le mode d’expression du peuple en démocratie est une question essentielle qui renvoie à l’opposition ou la complémentarité entre démocratie directe et démocratie représentative. Montesquieu, dans L’Esprit des lois, entendait montrer la supériorité du gouvernement représentatif, au contraire de Rousseau qui était hostile au principe de la représentation. Sa position était que la volonté générale « ne se représente point » et que « toute loi que le peuple en personne n’a pas ratifiée est nulle : ce n’est point une loi ».

Pour la DDHC de 1789, c’est la formule de compromis de Talleyrand qui a été retenue dans l’article 6. « La Loi est l’expression de la volonté générale. Tous les Citoyens ont droit de concourir personnellement, ou par leurs Représentants, à sa formation ». Mais comment la loi ou plutôt les innombrables lois des Etats modernes pourraient elle être vraiment l’expression d’une introuvable volonté générale ?

La suprématie de la démocratie en Occident date de 1945 avec l’écrasement du nazisme et du fascisme et de 1989 avec l’effondrement du communisme soviétique. Elle est associée à la liberté et à l’Etat de droit. Pour P. Lauvaux (« Les grandes démocraties contemporaines »), la démocratie n’est pas seulement une forme de gouvernement. C’est à la fois un « principe de liberté » et un « principe de légitimité ». Et la crise de la démocratie moderne est avant tout une crise de légitimité.

La formule « gouvernement du peuple, par le peuple et pour le peuple » de l’article 2 de la Constitution française n’est elle pas un mythe ? Elle fut d’abord employée par Abraham Lincoln en 1863 sur le champ de bataille. En effet, pour un humaniste ou un croyant ancré dans une perspective universelle, la loi locale et circonstancielle peut être tolérée comme un moindre mal ou un compromis. Elle peut être imposée de force à un citoyen qui la récuse. Mais elle n’aura jamais pour lui une valeur supérieure à la Loi de sa conscience. Surtout quand l’injustice ou l’inadéquation aux circonstances des lois écrites est évidente. La confrontation entre les thuriféraires de la loi républicaine et la liberté de conscience sera d’autant plus rugueuse qu’ils font face à des croyants rigoristes comme certains musulmans.

Les lois ne sont donc légitimes que pour une partie des citoyens et le fameux Etat de droit devient en réalité un rapport de force où les juristes imposent les textes de lois qu’ils rédigent. Ensuite les « forces de l’ordre » contraignent le peuple à obéir à l’interprétation qu’en donne leur hiérarchie. Quand la légitimé de telle ou telle loi est refusée par une partie significative de la population, la rue se fait entendre et la situation peut dégénérer en escalade de violence, c’est une impasse.

Dans leur fonctionnement, les démocraties modernes sont un mix de démocratie représentative et de démocratie directe. Le référendum est plutôt classé dans les outils de la démocratie directe, mais il peut s’avérer utile pour compléter la boîte à outils de la démocratie délibérative que ce blog préconise.

2 Un référendum, pourquoi et pourquoi faire ?

Tout gouvernement doit prendre appui sur deux piliers. Le premier est l’adhésion populaire aux grands choix structurant la vie collective qui lui donne sa légitimité. Le second est la capacité de projection dans l’avenir, parfois en rupture avec l’opinion du plus grand nombre. C’est une éthique de responsabilité qui est la marque des grandes démocraties et peut être assumée par les pouvoirs exécutifs ou les assemblées délibérantes. L’abolition de la peine de mort grâce au talent de Badinter pour convaincre les élus en est une illustration.

Le référendum est un outil utile pour ces deux piliers. Pour consolider l’approbation des choix majeurs de la collectivité, ou pour sonder et préparer une évolution jugée souhaitable de l’opinion publique. Il renforce aussi la démocratie en permettant une expression non médiatisée des citoyens précédée d’un débat ouvert qui offre un contrepouvoir aux gouvernants en place.

Historiquement, le référendum a lentement émergé, d’un point de vue théorique et pratique, pour rééquilibrer les pouvoirs publics. Dans de nombreux Etats de l’Ouest américain, les instruments de démocratie directe se sont développés au début du XXème siècle en réaction au pouvoir d’influence trop important de certains groupes d’intérêts. Comme la compagnie des chemins de fer dans les assemblées représentatives de Californie. L’influence du lobbying sur les élus ne date pas d’hier !

En Suisse, le référendum est devenu un pilier de la vie démocratique à l’échelon de la fédération comme des cantons. De 1848 à février 2004, il s’est tenu 517 référendums. Et de 1892 à mai 2004, 244 initiatives populaires ont ou auraient pu se concrétiser par un référendum. En moyenne, les électeurs suisses votent quatre fois par an pour des référendums fédéraux avec un taux de participation qui oscilla longtemps entre 50 % et 70 % avant de baisser récemment à 40 %.

L’école « participationniste » souligne la perte de légitimité des représentants trop éloignés des aspirations populaires et la nécessité d’introduire dans la vie publique des éléments de démocratie semi-directe. Pour approfondir le sujet, on peut lire : https://www.conseil-etat.fr/publications-colloques/discours-et-interventions/referendum-et-democratie.

En pratique politique, le référendum fait un retour notable en Europe : référendum grec sur la politique d’austérité, référendum hollandais sur le projet d’accord entre l’Union européenne et l’Ukraine, référendum britannique sur l’appartenance à l’Union européenne, référendum hongrois sur l’immigration, référendum italien sur la réforme de la Constitution… Incontestablement, les résultats de ces référendums montrent le fossé entre le peuple et ses dirigeants, mais aussi entre le peuple et l’Europe.

Ces recours au référendum prouvent que de nombreuses démocraties cherchent à favoriser l’expression directe des citoyens. Or le référendum est un instrument polymorphe dont les théories et pratiques varient d’un pays à l’autre.

3 les diverses formes de référendums

La décision de recourir au référendum vient généralement des gouvernants. Quand elle émane du pouvoir exécutif, elle peut éveiller des soupçons de manipulation plébiscitaire. Alors qu’une initiative populaire ou parlementaire semble plus « démocratique ». La population consultée peut-être celle d’un Etat nation, ou d’un de ses territoires, elle peut aussi être celle d’un Etat fédéré ou de la Fédération. Il peut être constitutionnel, législatif ou consultatif et porte plus rarement sur une décision administrative. Le référendum peut être facultatif ou obligatoire en fonction des institutions et pratiques des pays.  Enfin il peut être suspensif ou abrogatif.

Le référendum est la forme suprême de la démocratie quand il conduit à la création ou à la scission d’Etats, à l’autodétermination de populations ou à l’adoption de constitutions. La France a beaucoup théorisé lors de la Révolution, mais très peu pratiqué le référendum. A part avec De Gaulle, pour passer au-dessus des divisions partisanes qui avaient miné la quatrième République. Un référendum constituant a permis le passage à la 5ème République et un autre a permis la décolonisation, urgente pour sortir de la guerre d’Algérie. Il a aussi été utilisé pour Djibouti et les Comores.

La Suisse et les Etats fédérés des USA recourent beaucoup au référendum. Dans la Suisse fédérale, il faut un référendum pour changer la Constitution et le recours à l’initiative populaire est prévu pour une revue complète de la Constitution. Et c’est la Constitution du pays et non le gouvernement qui détermine si l’on doit tenir un référendum sur un enjeu donné, et il est alors obligatoire. L’initiative populaire remplit en Suisse une fonction essentielle d’inscription d’une question à l’ordre du jour politique et impacte les politiques publiques, soit par l’adoption de la mesure proposée, soit par les concessions faites à l’opinion par le législateur pour éviter un résultat qu’il redoute.

Suite aux révisions constitutionnelles en France, le référendum est devenu obligatoire pour tout traité relatif à l’adhésion d’un Etat à l’Europe et un référendum local est accessible à toutes les collectivités. De leur propre initiative et à leurs frais, elles peuvent organiser un référendum relatif à un projet de texte relevant de leur compétence. Le caractère décisionnel du référendum est conditionné par un niveau suffisant de participation des électeurs.

Le référendum pour abroger une loi ou révoquer un élu n’existe pas en France. Mais en Californie, c’est un référendum qui a permis à Schwarzenegger d’être élu après la révocation du précédent. Il existe aussi en Italie pour abroger des lois en vigueur.

Le référendum d’initiative partagé existe dans beaucoup de pays. Il est possible en France depuis 2015, à l’initiative de 1/5ème des parlementaires ou 1/10ème des électeurs inscrits et concerner des réformes économiques, sociales et environnementales ou la ratification d’un traité. En pratique ce type de référendum n’a jamais été utilisé.

Le référendum d’initiative citoyenne (RIC) existe dans beaucoup de pays mais n’est pas prévu par la Constitution française. La mise en place d’un RIC est réclamée par plusieurs organisations depuis des décennies et faisait partie des revendications du mouvement des gilets jaunes. L’instauration du RIC en France constituerait une évolution importante de l’outil référendaire s’il était étendu aux décisions constituantes, législatives, et même abrogatoires ou révocatoires.

4 Utilité et risques de l’outil référendaire

L’outil référendaire peut accélérer l’évolution vers une démocratie délibérative. Mais il comporte des risques et des limites, surtout dans des espaces politiques beaucoup plus complexes que les cités grecques ou les cantons suisse. Dans les grandes démocraties, un usage raisonné de ce mode d’exercice de la souveraineté est devenu incontournable. Mais le référendum ne peut exprimer de manière régulière et habituelle une aléatoire « volonté populaire ». Et les risques de dérive et de dévoiement de cet outil doivent être prévenus par un encadrement juridique et des conditions de mise en œuvre adaptées.

Un référendum peut résoudre des problèmes politiques pour les gouvernements en place sur une question qui divise la société et les partis, comme celui de 1975 au Royaume-Uni sur le maintien au sein de la Communauté européenne, ou celui de 2016 sur son retrait. Les gouvernements peuvent avoir besoin d’un mandat populaire précis pour apporter des changements fondamentaux qui ne faisaient pas partie de sa plateforme de campagne ou faire face à des événements imprévus.

Il permet d’associer les électeurs aux décisions prises dans les territoires, comme les référendums communaux, consultatifs en France ou les consultations décisionnelles, obligatoires ou non, prévues par la révision constitutionnelle de 2003 pour un changement de statut d’une collectivité territoriale. Le dernier référendum local français portait sur la construction très conversée de l’aéroport Notre-Dame-Des-Landes, approuvée à 55,17 %. Les travaux n’ont jamais démarré et le projet a finalement été abandonné.

Le résultat d’un référendum n’est donc pas toujours déterminant, le plus connu étant celui sur la Constitution européenne de 2005 dont le résultat paraissait acquis pour le président de la République avec le soutien de tous les grands partis de gouvernement, UMP, PS et UDF. Le débat passionné de la campagne électorale révèle un fort mécontentement de l’opinion publique. Le « non » l’emporte à 54,67% des suffrages avec 69% de participation, précédant celui des Pays-Bas le 1er juin. Malgré ces votes, la construction européenne a continué.

L’expression directe du peuple par référendum peut avoir des conséquences sur les principes de liberté et de légitimité. Cette expression en est-elle bien une émanation, voire la quintessence ? Ou au contraire, menace-t-elle ces principes en remettant en cause les libertés et l’Etat de droit ? Sur ce sujet, on peut consulter l’article https://www.cairn.info/revue-francaise-de-droit-constitutionnel-2003-1-page-73.htm

Le danger le plus évident est l’instrumentalisation par un pouvoir autoritaire. La France a été marquée par les référendums plébiscitaires du Premier et du Second Empire pour permettre aux Napoléons de légitimer leur pouvoir. Le plébiscite a été l’un des instruments de la glorification du Führer dans l’Allemagne nazie. Mais également un instrument de politique étrangère pour montrer au monde, à des moments stratégiques, que le peuple allemand se tenait derrière son führer.

Le référendum plébiscitaire reste une arme de choix pour les régimes autoritaires ou populistes comme en Hongrie actuellement. L’équilibre des pouvoirs est un des fondements de la démocratie. Le référendum ne devrait pas servir à contourner des Parlements indociles ou des règles constitutionnelles contraignantes, comme celles limitant le nombre des mandats. A l’inverse, celui de 2000 en France a acté la réduction du mandat présidentiel à cinq ans.

Le référendum confère un avantage certain aux options démagogiques ou conservatrices. L’abolition de la peine de mort en France, un progrès démocratique majeur, aurait certainement été rejetée à l’époque si l’outil référendaire avait été utilisé. Quant aux référendums sur l’organisation des collectivités territoriales, ils ont plus souvent favorisé l’émiettement ou la scission de collectivités que leurs regroupements, leur réduction ou leur simplification.

Un référendum peut aussi amalgamer une multitude de questions distinctes. Une réponse unique peut s’avérer trop simplificatrice pour répondre correctement aux enjeux abordés. Surtout s’il n’est pas précédé d’un débat approfondi que les Parlements peuvent accompagner pour mûrir les options et les choix retenus et enrichir par des amendements le texte soumis à la décision du peuple.

Ainsi, le référendum, par son caractère binaire, sa force et la brutalité de son résultat peut être dangereux s’il est utilisé dans un contexte émotionnel. Face à la crise de la démocratie en Europe, des partis peuvent en faire un instrument politique pour canaliser la colère des citoyens vers un repli nationaliste. Mais continuer à faire l’impasse sur une révolte sourde, et priver le peuple de la possibilité de s’exprimer, c’est courir le danger d’une explosion sociale imprévisible. Il faut enrichir avec sagesse la boîte à outil de la démocratie.

5 Le projet initial de référendum pour réduire le nombre de parlementaires

C’était dans le projet de loi constitutionnelle présenté par le premier ministre Philippe quand le parti du président disposait d’une majorité absolue. Mme Braun-Pivet en était la rapporteure. Ce projet déposé le 9 mai 2018 a avorté après moins de deux semaines de travail et une dizaine d’auditions. Il n’y aura aucune publication de rapport ni de conclusions.

Le président avait annoncé : « si cela est nécessaire, je recourrai au référendum». Il y avait deux réformes majeures dans ce projet. La réduction de 30% de l’effectif des trois assemblées constitutionnelles, Parlement et CESE. Et le « pacte girondin » ébréchant l’uniformité centralisatrice pour s’adapter à la situation de la Corse et de la Réunion qui nécessitait une réforme de la Constitution. La réduction des effectifs des assemblées va évidemment à l’encontre des intérêts des partis et des élus en poste. D’où la pertinence de l’outil référendaire. La réduction s’accompagnait pour l’Assemblée Nationale d’une dose de proportionnelle. Et pour le CESE d’une redéfinition de son rôle pour le transformer en « Chambre de la Société Civile » avec l’introduction d’une dose de citoyens tirés au sort.

Après les législatives, le nouveau président présente le 3 juillet 2017 au Congrès parlementaire les grandes orientations de son quinquennat et son analyse de la situation française. Ce discours s’avère prémonitoire quand le président veut « convaincre tous ceux qui attendent, qui nous font confiance du bout des lèvres, qui n’ont pas voté, ou que la colère et le dégoût devant notre inefficacité ont conduit à des choix extrêmes d’un bord ou de l’autre de l’échiquier politique ». Il parle avant la colère des gilets jaunes d’octobre 2018, qui le décidera à lancer le Grand débat national de janvier 2019, et les législatives de 2022 qui verront la poussée des extrémismes de droite et de gauche.

Il souhaite « une administration plus déconcentrée, qui conseille plus qu’elle ne sanctionne, qui innove et expérimente plus qu’elle ne contraigne ». « Notre peuple n’est pas formé d’un peu plus de soixante millions d’individus qui cohabiteraient. Il est indivisible par ce lien fraternel qui nous unit et dont nous devons retrouver la vigueur. Nous devons substituer à l’idée d’aide sociale, à la charité publique, aux dispositifs parcellaires, une vraie politique de l’inclusion de tous. Ne vous y trompez pas, cette question est la plus profonde, la plus sérieuse qui soit, parce que notre société est aujourd’hui divisée. Entre les égoïsmes tentés par les sirènes de la mondialisation et les donneurs de leçons qui oublient toutes les contraintes du réel pour s’occuper d’une partie de la société ».

« La France n’est pas un pays qui se réforme. La France est un pays qui résiste aussi longtemps qu’il est possible de ne pas réformer, un pays qui se cabre quand on lui parle mal, quand on ne lui explique pas. Quand on ne le respecte pas, quand on ne parle pas à sa dignité et à son intelligence ! Ce ne sont pas les Français qu’il faudrait désintoxiquer de l’interventionnisme public, c’est l’Etat. Il faut protéger les plus faibles sans les transformer en mineurs assistés permanents de l’Etat, de ses mécanismes de vérification et de contrôle. Tout sera fait pour rendre aux Français leur autonomie confisquée. Redonner sa place à l’intelligence française, c’est permettre à chacun, à chaque territoire de réussir, de s’engager ».

Dans le projet de loi abandonné de 2018 « pour une démocratie plus représentative, responsable et efficace »; les effectifs parlementaires étaient réduits de 30 %, 404 députés (contre 577) et 244 sénateurs (contre 348). A l’Assemblée nationale 15 % de son effectif, 61 députés, serait élu au scrutin de liste national à la représentation proportionnelle.

Les groupes Les Républicains, La France insoumise, le PS, le Parti communiste, le Rassemblement national quittent la commission d’enquête le 26 juillet. Ils dénoncent un « sabotage » par le groupe La République en marche qui ne juge pas nécessaire de procéder à l’audition de « toute la chaîne hiérarchique » de l’Élysée et du ministère de l’Intérieur. Yaël Braun-Pivet porte plainte contre les messages de menaces et d’injures sexistes et antisémites dont elle est victime sur les réseaux sociaux depuis le début de l’enquête sur l’affaire Benalla. Sans connaître les discussions de couloirs, je pense que cette affaire fut un prétexte opportun pour l’obstruction parlementaire des députés qui ne voulaient pas tailler dans leur effectif pléthorique.

6 Une suggestion pour lancer deux référendums présidentiels avant 2027

La Constitution française a été modifiée à plusieurs reprises pour élargir les possibilités de recours au référendum. Depuis 1995, les réformes affectant la politique économique, sociale, environnementale de la Nation et les services publics sont entrés dans le champ du référendum législatif. Le recours au référendum reste rare et la quasi-totalité des révisions constitutionnelles ont été adoptées par la voie du Congrès.

La Constitution en vigueur permet : le référendum législatif (article 11 qui inclut le référendum d’initiative partagée) ; le référendum constituant (article 89) ; les référendums territoriaux (article 72). Elle l’impose pour la ratification de l’adhésion d’un État à l’Union européenne (article 88). Le référendum est précisément encadré par des dispositifs préventifs, un contrôle en amont par le Conseil constitutionnel ou le Conseil d’Etat. Le Conseil constitutionnel contrôle notamment que l’initiative est conforme à la Constitution.

A court terme et dans le cadre des institutions actuelles, ce blog propose une solution très simple pour améliorer la démocratie, réduire les risques de blocage institutionnel et faire des économies. Il serait de lancer deux référendums à l’initiative présidentielle. Il est essentiel de le faire avant 2027 parce qu’il ne vont pas dans le sens de l’intérêt financier des grands partis. Surtout les partis extrémistes comme le Front National et LFI dont la caisse est tendue et que les élections renflouent en fonction du nombre d’élus.

Le premier, dans 6 mois ou un an (il est maître du calendrier) pourrait aboutir à la réduction du nombre des parlementaires abandonnée. Ce référendum intervenant dans un an ou à mi-mandat, le oui devrait passer pour réduire les dépenses publiques malgré la réticence des partis qui tiennent à leur fromage parce que 86% des français dans le grand débat national étaient en faveur de la réduction du nombre de parlementaires. La suppression du Conseil Economique, Social et Environnemental y a été souvent évoquée.

La réduction du nombre de députés déclenchera logiquement une dissolution de l’Assemblée avec un redécoupage des circonscriptions qui passeraient de 577 à 403 et mieux encore à 289 si l’option 50% de réduction est proposée et décidée dans le référendum. Les nouveaux députés auront eu le temps de nous prouver qu’ils savent travailler ensemble au lieu de s’invectiver et de conforter leur ancrage local. L’opinion n’y verra pas une décision jupitérienne de revanche électorale mais une conséquence de la décision des citoyens. Elle permettra un échelonnement dans le temps souhaitable entre les présidentielles et les législatives et devrait réduire l’abstention.

Les économies possibles portent sur les budgets suivants : 562 Mn d’euros pour l’Assemblée Nationale, 338 pour le Sénat et 46 Mn pour le CESE (les CESE Régionaux nous coûtent déjà 60 Mn !). Il y a des frais fixes, on peut difficilement couper en deux leurs palais, mais les enjeux d’économie sont considérables face au coût d’une petite dizaine de hautes autorités citoyennes permanentes de 27 personnes motivées bénéficiant d’indemnités modestes. Un référendum est toujours coûteux, mais celui-ci permettra des économies rapides qui le rendront très rentable pour le contribuable.

Après ce succès référendaire prévisible un deuxième référendum majeur pourrait être déclenché avant la fin du quinquennat pour poser la question du passage de la République « une et indivisible » à un Etat fédéral (post 56). Le oui n’est pas acquis, mais le débat sera vraiment lancé. L’enjeu est majeur pour l’avenir de notre nation complexe tiraillée par ses divisions.

Comme pour le référendum gaullien sur la régionalisation, le passage à l’Etat fédéral pourrait intervenir après le mandat présidentiel actuel, ce qui permettrait de disposer de temps pour bien l’organiser, en particulier pour les territoires excentrés pour éviter de créer une inutile complexité. Ce serait aussi l’occasion de supprimer le département, maillon faible et coûteux du millefeuille administratif.

Ces référendums entent dans les prérogatives du président réélu qui est maître du calendrier et de la formulation des question posées. En les initiant, il entrerait dans l’Histoire comme un des grands refondateurs de la nation française qui aura bien anticipé le risque de votes extrémistes en 2027. Car beaucoup d’électeurs des partis extrêmes votent plus par dépit ou provocation que par conviction. Ces référendums affaibliront leur position et leurs récriminations.

7 La question du Conseil économique, social et environnemental (CESE)

Au Palais d’Iéna siège tranquillement la troisième assemblée constitutionnelle, le Conseil économique, social et environnemental. Il est saisi par le Gouvernement et donne son avis sur des projets de loi, d’ordonnance ou de décret. Beaucoup se demandent à quoi servent ses rapports, seule production visible d’un travail à peine visible pour un coût trop élevé, une situation souvent critiquée par la Cour des Comptes. Les appels à supprimer le CESE et ses antennes régionales CESER n’ont jamais abouti. Or ils contribuent à discréditer le monde politique dans l’opinion publique. Ils sont accusés de consolider des corporatismes, de financer abusivement des permanents d’organisations syndicales ou associatives, d’assurer une préretraite dorée pour des personnalités en fin de carrière, et de servir de renvoi d’ascenseur à des amis politiques.

Le rapport du Sénat de 2009 (https://www.senat.fr/rap/r08-389/r08-389.html) laisse dubitatif et conclut par : « Le CESE se trouve aujourd’hui à la croisée des chemins. Trop longtemps cantonné dans un anonymat relatif, il se voit offert (avec la loi de 2008) l’opportunité d’affirmer son statut d’assemblée constitutionnelle ». Plus d’une décennie après, le CESE n’a toujours pas convaincu de son utilité réelle.

Pour mieux comprendre ce que fait ce CESE, on peut lire l’article bien documenté de 2019 : « écrire à l’image de son institution de Thomas Lépinay (https://www.cairn.info/revue-internationale-de-politique-comparee-2019-4-page-33.htm). Il rappelle qu’il est d’abord apparu comme Conseil national économique en 1925 puis s’est réincarné (Conseil économique, Conseil économique et social) avant d’être intégré à la Constitution de 1958. Il décrit la « routinisation du travail rédactionnel de conseillers issus de syndicats ou d’associations qui ont souvent mené des négociations. L’écriture du rapport dépend des configurations des sections, de la trajectoire de leurs membres, de la relation qui s’instaure entre le président de section, le rapporteur, les administrateurs et les membres de la section ». Ils écrivent un rapport faisant consensus interne avec un minimum d’efforts.

« Déconcertés par la définition peu précise de l’institution et sa relative marginalité, les conseillers et les fonctionnaires ne savent pas à qui ils s’adressent dans l’écriture du rapport ». En réunions de section, ils parlent d’écrire pour un monde administratif, ou pour le grand public. Un rapporteur dit : « Il faut avoir le grand public comme objectif, nos recommandations seront pillées par nos interlocuteurs, les ministères, par les journalistes, mais aussi par des gens de toute sorte, ce sera la reconnaissance de la valeur ajoutée du Conseil »), pour les partenaires sociaux. Une présidente de section ajoute : « C’est aussi une saisine pour les partenaires sociaux. Il faut oser y confronter nos points de vue pour y mettre des propositions innovantes et utiles »), pour TF1, pour l’Ifremer…

T. Lépinay affirme « qu’au palais d’Iéna, les luttes internes sont permanentes, du fait du caractère parlementaire de l’institution, et s’expriment au cours des processus de coécriture ». Le CESE est une assemblée hétéroclite de privilégiés débattant dans une atmosphère confinée, très éloignée de ce que l’on pourrait attendre d’une institution favorisant un débat collectif éclairant le gouvernement ou l’opinion publique. Que pourrait donc faire une petite dose de citoyens tirés au sort dans cette galère ?

Le CESE est une institution d’un autre âge, quand le roi consultait les corporations. Comme les dinosaures, le mieux serait qu’il disparaisse. C’est au peuple d’en décider après une délibération nationale et un référendum pour en tirer les conclusions.

Le président Macron peut utiliser judicieusement l’outil référendaire pour aller résolument vers une démocratie délibérative au lieu d’une démocratie participative bornée par les pouvoirs considérables de l’hyperprésident français (post 49).