Dans l’Inde moderne, le sacré est omniprésent dans une grande diversité d’expressions religieuses et spirituelles. Les spiritualités nées en Inde sont très complexes. Pour la paix dans le monde, il faut faire un pont entre le Veda et les grandes religions. Avec l’Islam, composante majeure de la sociologie du subcontinent indien, et le Bouddhisme, né en Inde puis marginalisé par les brahmanes. Il s’est ensuite répandu en Asie et plus récemment en Occident.

Le contexte mental du téléspectateur français moyen, athée, agnostique ou vaguement chrétien est totalement différent de celui de l’indien. Certains ont de vagues souvenirs d’un catholicisme fait de réminiscences bibliques, de doctrines cléricales et de superstitions. Mais les scandales publics de la « sainte église romaine catholique » ont fait comprendre même aux « cathos » les plus endoctrinés que cette église était tout sauf sainte. L’opinion publique est plus réticente que jamais à toute influence des clergés.

Une petite minorité d’athées est prête à brandir une laïcité d’obscurantisme (post 55) face à toute manifestation publique d’une religion. Surtout si elle met en exergue un ou des guides spirituels vite taxés de gurus, terme très péjoratif pour la pensée commune française. A l’inverse de ce qui se passe en Inde. La campagne antisecte contre toute spiritualité non conventionnelle a mis à l’index des associations hindouistes bénéfiques pour leurs membres comme pour la société. Elle a laissé des traces. A l’autre bout du spectre du sectarisme, les islamistes sectaires, parfois criminels, sont une petite minorité d’ignorants vociférants qu’il est sage de ne pas provoquer.

La télévision française consacre le dimanche matin à des émissions évoquant sans polémiques les grandes religions. La sensibilité hindouiste est la seule à ne pas être présente. Or il y a plus d’un milliard de croyants se référent au Véda, un texte sacré largement inconnu dans la France moderne. Pourtant, avant la mode de l’orientalisme créée par la colonisation qui la confronta avec le monde musulman, la France avait connu une période de Lumières. Des savants français comme Anquetil-Duperron, Langlois et Burnouf ont été des précurseurs pour faire connaître les grands textes sacrés de l’Inde en Europe.

1 Intégrer l’hindouisme dans la grille TV d’A2

Les émissions religieuses du dimanche d’A2 présentent de 8h30 à 12h, dans l’ordre le bouddhisme (15’, sous l’égide de l’Union Bouddhiste de France), l’Islam (30’), le Judaïsme (15’), trois branches du christianisme (1h30) puis une messe catholique (1h).

Une émission sur A2 assumée par la fédération védique pourrait avoir come objectif premier de dissiper les préjugés négatifs à l’encontre de l’hindouisme alors que l’Inde a une très bonne image. Mais aussi de donner envie aux personnes en recherche d’en savoir plus sur les spiritualités de l’Inde. C’est ce que Vivekananda avait réussi à faire en présentant l’hindouisme aux USA en 1893. Puis lors de ses séjours ultérieurs en Europe (post 9).

Comme la majorité de français se déclarent de culture chrétienne, les émissions chrétiennes dominent logiquement cette grille de programme. La pratique cultuelle a largement disparu en France. Les musulmans sont maintenant la première religion de France sur la base de la pratique religieuse. Mais le culte diffusé à la télévision permet aux chrétiens âgés ou isolés de participer à une célébration collective. Ces émissions chrétiennes, orthodoxe, protestante ou catholique, sont pilotées par leurs clergés. Soit comme officiants de cultes et prédicateurs, soit comme théologiens. S’y ajoutent quelques reportages.

L’émission « sagesses bouddhistes » présente surtout des bouddhismes religieux (post 7) avec des moines et de monastères de diverses obédiences. C’est une évolution tardive du monde bouddhiste très éloignée de la vie de Bouddha et de ses disciples (post 4), des moines errants renonçant à toute convoitise et qui enseignaient l’octuple sentier du Dharma. Elle présente aussi, mais plus rarement, des analyses de l’enseignement original de Siddhârta Gautama.

L’émission sur l’Islam présente des documentaires sur la culture arabe ou musulmane, des analyses sur le texte du Coran. Elle n’est pas une retransmission de culte avec un imam prêchant. L’émission sur le Judaïsme présente aussi des reportages. Elle fait souvent intervenir des érudits de grande qualité intellectuelle qui nous transmettent des traditions d’étude de la Torah par les rabbins.

Cette émission bouddhiste et celles de la famille abrahamique (« les religions du Livre »), permettent aux téléspectateurs chrétiens et agnostiques de découvrir sans préjugés la manière dont nos frères bouddhistes, juifs et musulmans vivent leur foi et en parlent. Les téléspectateurs se familiarisent ainsi avec leurs cultures et ces émissions s’inscrivent bien dans une laïcité de Lumières.

Dans le contexte de cette grille, une émission qu’on pourrait appeler « spiritualités de l’Inde » compléterait le panorama proposé aux téléspectateurs. Les émissions religieuses attirent aussi des personnes curieuses et ouvertes d’esprit. Ils pourraient approfondir leurs connaissances des textes, pratiques et cultures reliées au Veda, ainsi que du contexte social des relations entre les religions et mouvements spirituels de l’Inde.

Ce qui est connu de l’hindouisme se limite généralement au yoga, aux arts, au folklore local et aux guides spirituels connus. L’Inde a une bonne image pour les français voyageurs et les esprits curieux. Mais certains gurus douteux ont laissé une mauvaise réputation dans le grand public et généré des préjugés que ces émissions pourraient dissiper. Depuis quelques décennies, l’évolution des rayons spiritualités des librairies prouve un intérêt croissant pour les religions non chrétiennes.

Une émission sur l’hindouisme pourrait inclure trois types de contenus, bien maîtrisés par les associations de la fédération védique avec leurs sensibilités complémentaires :

–              Les arts indiens inspirés par la spiritualité : musique, poésie, arts plastiques…

–              La vie et les enseignements laissés par les nobles guides spirituels historiques

–              Les textes sacrés qui nourrissent les spiritualités de l’Inde

Le contenu artistique peut être présenté tel quel dans la grille du dimanche. Mais la présentation des guides spirituels et des textes sacrés nécessite quelques précautions pour bien s’intégrer à l’émission et au cadre mental des téléspectateurs français. Montrer la dévotion excessive des adeptes d’un guru (même s’il dissuade le culte de sa personnalité) ou un culte collectif de pieux fidèles se prosternant devant des statues aurait un effet dissuasif et provoquerait les sectaires athées et islamistes.

Le mot religion, absent de la Parole de 1974-1977, et mal interprété dans le Coran (voir « din », post 39) prête à confusion. Il est souhaitable de rester dans un esprit de neutralité bienveillante face aux spiritualités de l’Inde. Ram Chandra (post 12) écrit vers 1945 : « Les jalousies entre sectes sont la principale cause de la chute de la civilisation indienne. L’amour universel, véritable base de la religion ayant totalement disparu, la religion que l’on considérait comme un lien entre l’homme et Dieu est devenue un obstacle. La spiritualité commence où la religion finit ».

Il est donc souhaitable de faire une présentation laïque des spiritualités de l’Inde dans une perspective universelle. L’anticléricalisme français, comme tout « isme », n’est pas de bon conseil. Car les nobles pasteurs et guides spirituels font un travail utile pour organiser le culte réclamé par leurs fidèles, répondre aux besoins des souffrants et modérer les excès des croyants sectaires de leur obédience. C’est quand ils font croire qu’il faut passer par eux et leurs cultes pour le Salut, quand ils couvrent leurs fidèles de ténèbres et d’effroi (22/11) que la Parole les récuse. La sagesse profane veillera à nous protéger de leurs dérives sectaires et rappellera l’impératif de laïcité.

L’hindouisme peut se présenter comme un chemin de pratique spirituelle où les brahmanes n’interviennent pas en tant que prêtres, en phase avec l’islam qui est sans prêtres et le judaïsme où les saducéens ont disparu. cela le différencierait bien du bouddhisme de pagodes, monastères et moines et du christianisme de prêtres, popes et pasteurs présentés à A2,

Mais dans les textes sacrés de l’hindouisme, il est difficile de retrouver la Parole universelle. Il faut remonter aux Vedas, en écarter les paroles d’hommes et les relier aux sutras de Bouddha et aux Gathas de Zarathoustra, dont ne nous connaissons que des fragments. S’appuyer sur les bons guides spirituels hindouistes est donc indispensable pour retrouver l’unité spirituelle du subcontinent.

2 S’appuyer sur l’enseignement des nobles gurus indiens

De grands spirituels précurseurs comme Kabir (1440-1518), ou le guru Nanak (1469-1539) ont marqué la spiritualité de l’Inde en faisant un pont entre l’hindouisme et l’Islam.

Ramakrishna (1836-1886) est un jalon majeur dans le rapprochement entre les grandes religions. Il a pratiqué les grandes traditions mystiques et atteint l’Absolu à travers chacune d’entre elles ; il enseigne : « Il n’est pas bon de penser que seule sa propre religion est vraie. Il y a différentes religions adaptées à différents croyants et pays, leurs doctrines sont variées. Chacun peut atteindre Dieu en suivant l’un de leurs chemins et en pratiquant de tout son cœur sa dévotion ». « Avant d’entreprendre des réformes sociales, il faut d’abord réaliser Dieu, le reste sera donné par surcroît ». « Il est impossible de décrire Brahmane, plus vous avancez, plus vous prenez conscience que Dieu est partout et fait tout. Lui Seul est le Guru qui nous donne connaissance et dévotion »

Son disciple Vivekananda (1863-1902) enseigne : « Toute âme est en puissance divine. Notre but est de manifester le divin qui est en nous, en contrôlant notre nature extérieure et intérieure. Parvenons-y par le travail, par l’adoration, par la maîtrise de l’esprit ou par la philosophie, par l’une ou plusieurs de ces voies ou par toutes et soyons libres. C’est là toute la religion. Les doctrines, les dogmes, les rites, les livres, les temples et les formes ne sont que des détails secondaires ».

Gandhi (1869-1948, post 41) a écrit : « Nous sommes tous les enfants du même Créateur et maltraiter un être humain, c’est porter atteinte à ces forces divines ». « Dès l’âge de 21 ans, je m’étais intéressé à d’autres religions, j’hésitai un moment entre le christianisme et l’hindouisme, mais je sentis que seule la religion hindoue me conduirait au salut ». « Si la prière ne m’avait pas secouru, j’aurais perdu la raison en traversant les épreuves les plus dures de ma vie, publique et privée. Il n’est pas question de faire jeûner l’âme de prière. Trois des plus grands maîtres du monde, Bouddha, Jésus et Muhammad, nous ont laissé le témoignage irrécusable que l’illumination leur est venue de la prière. Peu importe la manière dont on prie, chacun est à soi-même sa propre loi ».

Ramana Maharishi (1879-1950, post 11) comprend très jeune que la renonciation mène à l’union avec le Divin. Il quitte sa famille à 17 ans, en laissant ce texte à son frère : « Je suis à la recherche de mon Père, selon l’ordre qui m’a été donné. C’est une entreprise vertueuse, ne vous attristez donc pas, et ne dépensez pas d’argent en inutiles recherches ». Il enseigne : « Seule la question « qui suis-je ? » fera disparaître les pensées de l’intellect, et c’est seulement si l’intelligence se perd dans le Moi Supérieur qu’Il peut être réalisé… Celui dont le renoncement est véritable plonge dans le monde et élargit son amour pour embrasser le monde entier ». Quand un homme découvre son véritable Moi, quelque chose émerge des profondeurs de son être et prend possession de lui. Ce quelque chose est derrière l’esprit, il est infini, divin, éternel, certains l’appellent le Royaume des Cieux, d’autres l’âme, le Nirvana, les hindous l’appellent libération. Quand cela arrive l’homme ne s’est pas perdu, il s’est trouvé lui-même ».

Ram Chandra Babuji (1899-1983) écrit : « Dieu Seul est notre véritable guide, guru et maître, c’est Lui seul qui nous dispense la Lumière… Le moyen le plus important, infaillible d’arriver au but est la prière, elle établit notre lien avec Dieu à qui nous nous abandonnons avec amour et dévotion… Posséder Dieu, plutôt que simplement le connaître, est le véritable objet de la spiritualité ; tournez votre attention vers Dieu et allez de l’avant avec volonté, foi et confiance »

Mâ Ananda Moyî (1896-1982) enseigne : « Ce corps (en parlant d’elle) ne veut pas d’un ashram, soyez dans la joie et que de purs sentiments naissent en vous ; le monde entier est mon ashram qui est infini ». « Les chemins divers que suivent les hindous et les musulmans, finissent par de rejoindre à la porte de l’Être divin ». « Sans la Grâce divine, vous ne pouvez être attirés vers Dieu, mais pour mériter cette Grâce, il faut un effort continuel et rester sans cesse sur le qui-vive ». « Essayez de brûler ce qui peut être brûlé par la Connaissance et de faire fondre ce qui peut être fondu par la foi et la dévotion : alors le Suprême se révélera. La voie de la discrimination conduit à la réalisation de l’essence de la Connaissance et la voie de la dévotion à la révélation de l’essence de l’Amour ».

« Appliquez-vous aux exercices spirituels d’une manière tranquille et discrète ». « Vous êtes tous des enfants du Père tout puissant. Pour l’entendre, chaque religion dispose de moyens différents. C’est Dieu qui est à l’origine de tout, c’est Lui qui tisse la toile de la vie, c’est sous Sa direction que tout prospère. Connaissez-Le d’abord, Le connaître c’est tout connaître, et c’est la seule façon de s’élever au-dessus des doutes et des difficultés. Pour mériter le Royaume de Dieu, on doit purifier son âme par des exercices religieux assidus et perdre son ego en Dieu. Continuez vos prières tous les jours, Il entrera peu à peu dans votre cœur, Sa Présence envahira votre âme et restera en vous jusqu’à vos derniers moments. C’est cela qu’on appelle réaliser Dieu ». « Il n’y a qu’un seul et même Appel qui vient d’en haut et s’imprime profondément dans l’âme quand celle-ci, par l’effet d’une dévotion profonde, ne répond plus aux besoins de nos passions et nos désirs, mais est parvenue à la sérénité. Alors, et alors seulement, vient du fond de l’âme, la véritable réponse à l’Appel d’en haut, de l’Esprit éternel qui est descendu en vous. Et ainsi l’âme individuelle se transformera progressivement en l’Eternel. La prière est le pont qui relie l’âme universelle à l’âme individuelle. Quand est atteint le but de la vie, il sera évident pour tous que Dieu et la Vérité ne font qu’un et tous les chemins conduisent à la même Porte ».

« Le Bien est Vérité, la Vérité est Vie. Le mal est aussi irréel qu’une illusion, il est dû à votre propre perversité. Personne n’aime cultiver le mal. Dieu seul est bon et parfait, si vous cherchez toujours le Bien en vous, votre cœur sera plein de ce qui est bon et noble ». « A notre époque, il est très difficile pour un chercheur d’acquérir une conception du Divin, soit par les méthodes de yoga, soit en cherchant à fondre le moi individuel dans le Moi universel. Aspirez aux vertus qui assurent à l’âme la grâce et la vitalité et enrayez sainement vos désirs matériels excessifs. Ces vertus vous feront trouver Dieu, toujours présent dans toutes les fibres de votre corps et qui pourtant préfère rester caché. Quand par des exercices appropriés et assidus, la noirceur de votre âme est effacée, Dieu se révèle et c’est la paix absolue ». Ma encourage la compagnie des saints mais se défie du concept de guru : « Dieu Seul est le Guru, c’est un péché de regarder le Guru comme un être humain. L’homme qui est solidement installé dans la bonté essentielle à la nature humaine, on l’appelle un saint. Il est indifférent aux plaisirs de ce monde et il connaît le secret du Moi, il est toujours plongé dans la joie de la communion divine. Son esprit, comme celui d’un enfant est sincère, joyeux, libre de tout égoïsme. La vue d’un tel homme nous inspire, sa société éveille en nous le désir de connaître Dieu et purge l’âme de toute pensée impure. Les saints sont des êtres qui ont enrichi leur âme de la Grâce de Dieu. Asseyez-vous devant eux en silence et pensez à Dieu. »

Dans les paroles de ces nobles gurus de l’hindouisme, il n’y a rien à mon avis qu’un musulman ou un chrétien pourrait contredire sur la base du Livre sacré auquel il fait référence. C’est la méconnaissance condescendante qui fait que trop de croyants des religions du Livre voient en l’hindouisme un polythéisme ou un paganisme arriéré. Nos frères hindouistes adorent le Créateur sous de multiples formes, c’est leur chemin ascendant. Par contre pour dépasser la simple tolérance interreligieuse avec les religions du Livre et se rapprocher d’un amour fraternel véritable, il faut plonger dans les textes sacrés et en rechercher l’unité fondamentale.

3 Les textes sacrés marquants du subcontinent indien : Veda des rishis et Coran

En synergie avec les enseignements des guides spirituels, les textes sacrés doivent être replacés dans le contexte du subcontinent et de sa grande diversité religieuse. Dans une émission grand public, il faut les présenter avec une certaine neutralité, ni pour prouver la supériorité des textes védiques et des spéculations des brahmanes et philosophes classiques, ni à l’inverse celle du texte coranique si des invités musulmans participent à une émission « védique ».

La famille des religions de l’Inde reliée aux Vedas est souvent classée dans un ordre chronologique, védisme, brahmanisme et hindouisme. La Cour Suprême de l’Inde a retenu comme critère déterminant de l’hindouisme la référence aux Vedas. La tradition distingue la sruti qui inclut les Vedas et les Upanishads, de la smriti qui inclut le Ramayana et le Mahabharata, donc la Bhagavad Gita (dont le guide inspiré Ram Chandra donne une version plus courte que la tradition).

Pour retrouver la Parole révélée ou inspirée à la source et faciliter le rapprochement avec les autres textes sacrés, il faut se concentrer sur le Veda des rishis et laisser de côté les spéculations d’origine brahmanique et la notion d’hindutva chère aux nationalistes hindous (voir post 62 §3). Ce choix permet de travailler sur les textes sacrés libérés des innombrables interprétations, sans prendre parti entre les branches religieuses et lignées de gurus.

Dans le contexte moderne français, il est préférable de cibler la présentation des textes sacrés sur les versets à caractère universel tirés des deux grands textes sacrés qui guident la spiritualité du subcontinent indien, exprimés de manière poétique dans des langues différentes : le sanscrit ancien pour les Vedas et l’arabe pour le Coran.

Voici d’abord quelques extraits du Rig Veda dans la traduction de Jean Varenne (7.89) : « Si par hasard en la bassesse de mon intelligence je suis allé à contre-courant, ô Saint, aie pitié, Seigneur et pardonne…si par inconscience nous avons ruiné tes lois, ne nous fait pas de mal pour ce grief ô Dieu ». (10.71) : « Quand fut prononcée à l’origine la première Parole et qu’on donna des noms aux choses, ce qu’il y avait en celles-ci de meilleur, de pur, et qui était caché, se révéla avec amour. Quand les sages eurent formé la Parole en leur âme…la beauté s’imprima sur leur langage. Ils suivaient les traces de la Parole, ils la trouvèrent qui était entrée dans les poètes. La ramenant ils la partagèrent de multiples façons ; les sept sages l’ont fait retentir ». (10.81) : « Ses yeux tournés partout, lorsque Dieu unique, Il crée le ciel et la terre, Il les soude ensemble ».

Rig Veda 10.82 : « L’œil du Père qui est sage dans sa pensée a créé ces deux mondes, le ciel et la terre prirent leur déploiement. Au nombril du non Né, l’Un est fixé, Lui sur lequel s’appuient toutes les créatures. Vous ne connaîtrez pas celui qui a créé ces mondes, quelque chose d’autre vous fait écran. Les récitateurs d’hymnes, ravisseurs de vie, marchent enveloppés de nuées et de bavardage ».

Il y a dans le Rig Veda des récits de la Création, difficile à traduire et assez énigmatiques, mais qui recoupent des récits qu’on peut trouver dans la Genèse biblique et dans le Coran. En 10.129 : « Il n’y avait pas l’être, il n’y avait pas le non-être en ce temps. Il n’y avait ni l’espace, ni le firmament au-delà. Quel était le contenu ? Où était-ce ? Sous la garde de Qui ? Qu’était l’eau profonde, l’eau sans fond ? Ni la mort, ni la non-mort n’étaient en ce temps, Point de signe distinguant la nuit du jour. L’Un respirait sans souffle mû de soi-même : Rien d’autre n’existait par ailleurs. A l’origine des ténèbres couvraient des ténèbres, tout ce qu’on voit n’était qu’onde indistincte. Enfermé dans le Vide, le Devenant, l’Un prit alors naissance par le pouvoir de la chaleur. D’abord se développa le Désir, qui fut le premier germe de la pensée. Cherchant avec réflexion dans leurs âmes, les sages trouvèrent dans le non-être le lien de l’être. Qui sait en Vérité, d’où est issue, d’où vient cette Création ? Celui qui veille au plus haut du ciel le sait sans doute ; ou bien ne le sait-il pas ? »

Rig Veda 10.191 : « Allez, ensemble concertez-vous, uni soit le conseil, uni soit l’assemblée…unie soit votre intention, unis soient vos cœurs, unis soient vos esprits, qu’il y ait bon accord entre vous. »

Il ne sera pas difficile de mettre en parallèle ces textes avec des versets à caractère universel du Coran pour nourrir dans ces émissions une laïcité française de connaissance et de Lumières. Les divisions religieuses restent une cause de violence partout, mais notre pays offre un contexte favorable au développement d’une fraternisation entre croyants par la connaissance mutuelle. Nous n’avons plus de clergés assez influents pour instrumentaliser et attiser les préjugés religieux et notre pouvoir politique veille à la laïcité. La violence en Inde entre hindous et musulmans ou dans les pays musulmans entre sunnites et chiites ne pourrait pas prendre d’ampleur ici : la réflexion sur les textes sacrés et la remise en cause des interprétations humaines n’est pas tabou. Au contraire, elle peut tracer un chemin d’apaisement vers la connaissance mutuelle et l’amour entre croyants.

En retrouvant la Source de l’hindouisme, le Veda des rishis, en le rapprochant des Gathas de Zarathoustra, des sutras de Bouddha, et du Coran, on peut créer un pont solide entre les croyants de ces grandes religions tout en permettant à chacun de suivre chacun une voie spirituelle ascendante mais spécifique. Le Coran dit en (5/48) : « A chacun d’entre vous, Nous avons indiqué une voie générale (shir’a) et une voie spécifique (minha). Et si Dieu l’avait voulu, Il aurait fait de vous une seule communauté (umma). Il vous éprouve dans vos dons, rivalisez donc en bonnes œuvres. Vous retournerez tous vers Dieu, et Il résoudra vos divergences »; et en 49/13 : « Ô hommes ! Nous vous créons d’un mâle et d’une femelle et vous avons constitué en peuples et tribus afin que vous vous connaissiez les uns les autres. Devant Dieu, le plus noble d’entre vous est le plus pieux, car Dieu sait, il est renseigné ».

Un dialogue constructif en France entre des musulmans ouverts, des agnostiques en recherche et des croyants sensibles aux spiritualités de l’Inde peut participer à pacifier les relations entre les grandes religions du monde. La France n’a plus le rayonnement universel de l’époque des Lumières, mais elle peut soutenir une dynamique d’interconnaissance mutuelle en partant de sa base de connaissances avec sa culture chrétienne et l’apport des réformateurs de l’Islam, bien implantés et respectés ici.

Dans son adresse au Parlement, le président français parlait d’un « projet humaniste ». C’est bien, mais ce n’est pas suffisant, il faut revitaliser la spiritualité française que les clergés chrétiens ont étouffé. Les associations de la fédération védique comme celle de nos frères juifs, bouddhistes et musulmans y contribuent chacune à leur manière. Les chrétiens retrouveront leur dynamisme apostolique quand ils se libéreront de l’emprise cléricale, une évolution qui semble s’accélérer.

Le Créateur a choisi notre pays pour livrer une Parole qui pourra créer un pont entre les 2,2 milliards de chrétiens et les 1,8 milliard de musulmans. Ce peut être notre destin spirituel, mais c’est aux français de l’accomplir car Dieu laisse les hommes libres d’agir.

Cette suggestion à la fédération védique pour obtenir un créneau dans la grille de programmes français du dimanche matin s’inscrit donc dans un vaste projet spirituel bénéfique aux générations qui viennent.