Une hyperpuissance est une nation d’influence mondiale prépondérante dans la plupart des domaines démographique, économique, technologique, financier, militaire, géopolitique, diplomatique, culturel et médiatique. Le mot a été popularisé en 1998 par le ministre français des Affaires étrangères Védrine pour les USA après la désintégration de l’empire soviétique.
Les empires historiques avaient une connaissance limitée du reste du monde et leur empire s’est développé rapidement par la volonté de puissance d’un guerrier au sommet du pouvoir soutenu par des élites ou la masse populaire parce qu’il apportait la richesse des nations vaincues et la stabilité en interne. Leur empereur était en confrontation guerrière avec les peuples voisins et à la merci des révolutions de palais, ce fut le cas des empires égyptien, romain, perse, indien, russe ou chinois.
Les USA font exception car leur dynamisme d’extension géographique et économique a été progressif et est parti de la base, celle des colons européens revendiquant liberté et indépendance face aux puissances européennes dans leur Déclaration d’Indépendance de 1776. Mais dès 1823, le président Monroe établit une doctrine qui perdurera, celle « d’une destinée manifeste pour les USA de se déployer sur tout le continent américain que la Providence nous a confié » en restant neutre à l’égard des conflits européens. C’est l’exceptionnalisme américain qui marquera l’inconscient collectif des américains du Nord et galvanisera leur optimisme proverbial.
Au XIXème et XXème siècle, la puissance américaine se renforce, se déploie en Asie et les USA deviennent la plus grande économie du monde quand l’Europe est saignée par ses guerres sans fin.
1 L’origine des peuples du continent
Les fouilles réalisées sur cet immense continent n’ont retrouvé aucun hominidé primitif, seulement des homos sapiens modernes dont les premières traces d’occupation (marques de chasse sur les os d’animaux) datent de 30 000 avant J.C. dans des abris rocheux au Brésil. Les traces les plus anciennes en Amérique du Nord sont des vestiges de foyers retrouvés en Californie datés de – 28 000. L’examen attentif des progrès dans les techniques de chasse font penser à un développement de groupes humains qui va du Sud vers le Nord, ce qui contredit l’idée précédemment répandue que tous les humains d’Amérique seraient venus du Nord à la fin de la glaciation, donc à partir de – 16 000, quand le dégel ouvre des corridors de pénétration passant par le Détroit de Behring.
Du côté des linguistes, on distingue trois familles ancestrales, la famille Amérinde qui couvre toute l’Amérique du Sud et une bonne partie du Nord, de loin la plus ancienne, puis la famille Indopacifique au Canada et la famille Eurasiatique à l’extrême Nord. Les homos sapiens parlant les langues Amérindes ne peuvent venir que de Nouvelle Guinée ou d’Australie, déjà peuplées vers -45 000, par des groupes en recherche d’autres territoires de pêche et de chasse. Leurs bateaux les ont conduit au hasard des tempêtes et des courants d’abord dans les îles du Pacifique comme la Polynésie, puis sur les côtes pacifiques du continent américain, Chili ou Pérou, où ils ont développé leur vie collective avant de se répandre vers l’intérieur des terres.
Ces familles ou groupes humains ont pu venir successivement ou en groupes importants. Ils ont trouvé une terre propice à la survie avec des gibiers faciles à chasser comme le panda géant (disparu depuis) et leur population s’est rapidement multipliée. Leur type physique, à partir de la souche aborigène et de Nouvelle Guinée, s’est diversifié et adapté au climat local, peau très foncée ou plutôt cuivrée. Ce sont les peuples premiers du continent américain, des chasseurs-cueilleurs sans écriture ni monuments durables. On ne sait si ces peuples ont été marginalisés par les migrants asiatiques venus du Nord ou s’ils ont fusionné avec eux ?
L’histoire s’accélère avec les migrants du Nord qui développent une agriculture spécifique à l’Amérique avec le maïs, les courges, les tubercules et les haricots et s’étendent sur un vaste territoire en Amérique Latine. Les premières traces d’agriculture du maïs à Tehuacan datent de – 7000, les premiers villages stables de – 3000 et les premières civilisations organisées laissant des vestiges archéologiques débutent au IIème millénaire avant J.C., les Olmèques sur les côtes du golfe du Mexique puis les Mayas au Yucatan.
L’écriture utilise des glyphes, l’astronomie est sophistiquée, des temples spectaculaires mettent en scène les rois divinisés et les prêtres sacrificateurs. On estime à 300 000 habitants la population vivant autour de Tikal à son apogée (voir post 55). En parallèle, la civilisation de Teotihuacan connait son apogée au premier siècle. Des mésos américains migrent dans la vallée du Mississipi avec une variété améliorée de maïs. D’autres empires précolombiens émergent au premier millénaire, les Toltèques, suivis par les Aztèques. En Amérique du Sud, la civilisation Chavin émerge au premier siècle et l’empire Inca se constitue avant l’arrivée des colons espagnols.
Les populations d’Amérique Latine ont donc connu un développement de civilisations parallèle à celui des peuples restés proches du foyer mésopotamien. Ils ont construit des civilisations autonomes, sans liens avec leur continent d’origine. Le Nord du continent au climat plus rude est resté beaucoup moins peuplé et sophistiqué. Les estimations de population à l’arrivée des colons européens donnent 25 millions d’habitants pour le centre du Mexique contre 4 pour l’Amérique du Nord, peuplée de 240 tribus partagées en trois groupes linguistiques. Ces tribus plus ou moins sédentaires, en rivalité de territoire, étaient de culture orale, appelaient Dieu le Grand Esprit et vivaient en harmonie avec la nature.
Les premiers immigrants européens au Nord furent les Vikings venus du Groenland vers 1000, ils ne sont pas implantés durablement. Longtemps après viennent des explorateurs en quête de nouvelles richesses pour la couronne qui les soutenait, Colomb en 1492, Cortès en 1519, Cartier en 1535 qui ont stimulé les rivalités d’empires européens et les convoitises pour ces pays d’immenses terres et richesses naturelles à exploiter. Les premières tentatives d’établir des bases coloniales sont modestes et dispersées, après deux échecs français au Brésil (1555) et en Floride (1562). Les anglais fondent en 1600 l’East India Company qui finance les expéditions.
Les colons européens, aveuglés par leur supériorité technologique, méprisent la culture de ces peuples premiers dont ils écrasent les civilisations. Fragilisés par leurs rivalités et le détournement des richesses par leurs pouvoirs impériaux, les amérindiens sont décimés par les maladies, parfois massacrés, et l’équilibre démographique bascule en faveur des européens grâce à une immigration massive et une natalité vigoureuse encouragée par leur foi conquérante et la disponibilité des terres. Les colons européens deviennent dominants militairement et économiquement.
L’autre bouleversement a été le trafic d’esclaves africains importés au Brésil aux Antilles et aux USA, exploités sur les plantations coloniales. Les premiers esclaves arrivent en 1619 en Virginie, et leur population croît avec le commerce d’esclaves raflés en Afrique (surtout par les arabes et les ethnies africaines rivales) et par augmentation naturelle. Il y a déjà 120 000 esclaves pour la seule Virginie en 1756. L’historien Zinn estime que l’esclavage a fait quarante millions de morts ! Tout le continent reste imprégné d’un racisme pro-blanc accentué par le sentiment de supériorité de la religion chrétienne destinée à convertir ces « païens ».
2 L’héritage religieux des « pères fondateurs » et l’endoctrinement biblique
Les débuts coloniaux sont difficiles en Virginie (1607), et avec l’épisode du Mayflower (1621) où les immigrants doivent assurer leur survie et seront aidés par des amérindiens compatissants partageant leur savoir-faire d’agriculture, de pêche et de chasse. L’implantation au Massachusetts débute en 1630 et vingt mille anglais y affluent. Ces communautés puritaines commencent à s’organiser et se regroupent en 1643 en confédération défensive face aux colons hollandais et aux tribus hostiles.
Les rivalités entre la France catholique et l’Angleterre protestante se concrétisent dans les colonies, et la guerre de sept ans voit la victoire des britanniques. Les pasteurs américains en font une lecture providentialiste, exceptionnaliste et religieuse : Dieu favorise les protestants américains. Cette idéologie d’être un nouveau peuple élu, avec une « destinée manifeste » marquera durablement leur conscience collective et verra comme une preuve le développement extraordinaire de cette nation.
Les premières églises américaines sont des appendices plus ou moins autonomes des religions européennes mais tiennent un rôle majeur dans l’organisation sociale dont l’urbanisme est centré autour des églises et temples. L’annexion de nouvelles terres et l’immigration augmentera la part des catholiques, irlandais venus d’Europe ou latinos venus du Sud, mais le pays reste structuré autour d’une culture protestante, figée sur le texte biblique imposé à l’époque de l’empereur Constantin.
Elle met l’accent sur les doctrines de la trinité et du sacrifice rédempteur, les idées de Paul, de « Jean » et de l’Apocalypse. C’est une culture de pasteurs et prédicateurs qui endoctrinent leurs fidèles : « croyez en Jésus crucifié pour toute l’humanité et vous serez sauvés ». A la suite de Luther et de Calvin, ils ne se demandent pas qui a écrit leur Bible, ils en vénèrent le texte comme totalement inspiré. Les témoins de Jéhovah sont une illustration de cette pensée sectaire qui ignore totalement le Coran et a fortiori le Veda. Le président des USA prête encore serment sur cette Bible !
La première église spécifiquement américaine démarre avec les visions plus que douteuses du « prophète Smith » qui sera assassiné, mais autour duquel se constitue l’église mormone. Ses fidèles fuient les persécutions des églises officielles et partent en exode en 1847 vers l’Ouest, une rude épreuve qui se terminera en Utah, le fief de leur église. Elle grandira par leur zèle missionnaire aux USA et ailleurs, ils revendiquent 16 millions de fidèles, cette église est une puissance financière.
La religion chrétienne omniprésente se traduit par une rivalité d’églises en concurrence, du côté protestant avec les congrégationalistes, anglicans, presbytériens, quakers, réformés hollandais, églises allemandes, baptistes, méthodistes… Leur part relative varie d’une région à l’autre, mais les catholiques et les juifs resteront longtemps une infime minorité. Face à la domination puritaine au Nord, un grand réveil évangélique des « new lights » se met en place avec des prédicateurs itinérants dont le plus connu est Whitefield entre 1739 et 1770. C’est le prélude à la « Bible Belt ».
La population américaine actuelle reste fondamentalement attachée à une culture religieuse chrétienne avec des pasteurs ou prêtres et des lieux de culte communautaires. Ceux qui se distinguent de leur voisinage sont taxés d’individualisme stérile. Les athées sont mal vus et le marxisme n’a jamais pu prendre racine et a même subi la chasse aux sorcières à l’époque du maccarthisme.
Alors que les catholiques ont été endoctrinés dans la vertu de pauvreté, pour un pasteur protestant, sa réussite matérielle est la preuve qu’il est aidé par la Providence. La richesse des télévangélistes ne choque pas et leurs spectaculaires méga églises attirent de nouveaux fidèles séduits par leur vie communautaire et leur charité. Contrairement à la France avec sa jalousie, voire sa haine du riche, les américains admirent la réussite financière et rêvent de devenir milliardaire en créant leur entreprise. Cette alliance de la Bible et du dollar est un moteur essentiel du dynamisme américain et de l’extraordinaire réussite de cette nation.
3 L’émergence politique des Etats-Unis d’Amérique
Les premiers colons d’Amérique du Nord avaient une motivation très différente de ceux des empires coloniaux d’Espagne et du Portugal au Sud : ils fuyaient les persécutions religieuses par les clergés officiels sévissant dans leurs pays. C’est ce qui explique l’importance cruciale pour les « pères fondateurs » du pays et de ses institutions de la liberté religieuse et leur méfiance à l’égard des pouvoirs centralisés, le roi anglais ou l’église de Rome.
Les colons qui leur ont succédé partageaient à des degrés divers le zèle missionnaire mais y ajoutaient souvent la motivation de s’enrichir sur de nouvelles terres, surtout en Virginie et au Maryland où ils développent la plantation et l’exportation du tabac. Entre 1700 et 1776, la population européenne décuple à 2,5 millions par fécondité naturelle et immigration.
La référence chrétienne n’empêche pas l’oppression des amérindiens comme le fait remarquer Tocqueville en 1848 : « La tyrannie européenne affaiblit leur attachement à leurs terres, disperse leurs familles, détruit leurs traditions, efface leurs souvenirs. Leurs conditions morales et physiques ne cessent de se détériorer ». Entassés dans des réserves, livrés à l’alcool facile, contraints à abandonner leurs enfants à l’endoctrinement chrétien, ils subissent un lent génocide.
Le pouvoir est aux mains des blancs et les législations de la Caroline du Sud et de la Louisiane définissent comme « personne de couleur » tout individu ayant un seul ancêtre formellement reconnu comme de « sang » asiatique ou africain. Comme en Grèce, où la démocratie ne concerne d’abord ni les femmes, ni les esclaves, ni les « métèques » ! La répartition des immigrants européens est hétérogène, à dominante anglophone sur la côte Est, les allemands et les suisses viendront plus tard. Les colonies françaises à l’Ouest et espagnoles au Sud sont beaucoup moins peuplées et les colons anglophones naviguent dans les rivalités impériales entre Angleterre, France et Espagne qui instrumentalisent les tribus indiennes.
Dans la revendication d’autonomie des colons, le zèle missionnaire à distance des églises officielles du continent s’accompagne de la résistance au souverain anglais. Les taxes imposées par le Parlement de Westminster mettent le feu aux poudres et en Virginie, le député Patrick Henry appelle à la désobéissance civile. Les colonies se révoltent, c’est le « massacre de Boston » en 1770 où les soldats anglais tirent dans la foule, et la « Tea Party » en 1773 où quarante tonnes de thé importé d’Angleterre sont jetées à la mer par des colons déguisés en amérindiens.
Les treize Etats se soudent contre l’ennemi commun, le roi anglais et la « Déclaration unanime des treize Etats-Unis d’Amérique » est proclamée en 1776. Son rédacteur solitaire est un juriste, Jefferson qui adhère à la philosophie de John Locke (post 49), celle du droit naturel : « les hommes naissent égaux, dotés par leur Créateur de droits inaliénables parmi lesquels la vie, la liberté et la recherche du bonheur ». Elle fait une longue liste de reproches au roi pour justifier la rupture des liens. La tension persistera entre ceux qui insistent sur l’autonomie des treize colonies et ceux qui argumentent l’importance d’un Etat fédéral fort.
Avec l’aide des français, les colons gagnent difficilement la guerre d’indépendance et les anglais s’inclinent en 1783. Les USA sont devenus un Etat nation.
4 L’irrésistible ascension des USA comme puissance mondiale
Libérés de la tutelle anglaise, les colons se ruent vers l’Ouest dès 1780 au détriment des populations indiennes. Jefferson rachète à Napoléon la Louisiane en 1803. La guerre contre l’Angleterre entre 1812 et 1814 n’a pas de vainqueur net, mais consacre la puissance militaire émergente des USA. Les espagnols sont chassés de la Floride en 1818, un prélude à l’effondrement de leur empire. Convaincus que leur expansion montre le soutien divin, invoquant leurs devoirs et la cause sacrée de la démocratie, les USA, ne s’arrêtent au Canada qu’à cause de la puissance britannique. Ils étendront leur territoire jusqu’au Pacifique en s’imposant aux espagnols.
La France, rivale des anglais, propose à l’Espagne de l’aider à reconquérir son empire, et c’est dans ce contexte qu’est élaborée la doctrine du président Monroe en 1823 de domination du continent. Elle se traduit d’abord par l’annexion du Texas devenu indépendant en 1836 et après une courte guerre, du reste des terres au Nord du Mexique actuel, dont la Californie en 1850 qui déclenche la ruée vers l’or. L’achat de l’Alaska à la Russie (1867), et l’annexion de Hawaï, Cuba et des Philippines au détriment des espagnols (1898) complètent l’extension continue des USA.
Ce pays est devenu géographiquement une puissance mondiale et sa domination va s’amplifier avec les guerres qui saignent l’Europe et son développement accéléré dans les domaines industriels et militaires. Le dynamisme économique lié à la liberté d’entreprendre et à l’immigration se traduit par la création d’infrastructures sur tout le pays, le rail en particulier, l’exploitation des forêts et le développement de zones industrielles liées à l’extraction du charbon et à la fabrication textile.
En parallèle, le Sud se développe rapidement entre 1820 et 1860 autour du roi coton en exploitant les esclaves noirs et réprimant leurs révoltes de plus en plus fréquentes. Beaucoup réussissent à s’enfuir au Nord antiesclavagiste qui les libère mais qui continue à opprimer et décimer les Amérindiens et à accueillir une immigration considérable. Les irlandais catholiques sont pauvres et accusés par les nativistes de faire baisser les salaires au détriment des premiers colons.
L’irréductible opposition Nord-Sud aboutit à la guerre de Sécession. Le Sud, beaucoup plus faible démographiquement et sans l’appui des esclaves noirs est écrasé. L’esclavage est juridiquement aboli par le treizième amendement, mais les pratiques ségrégationnistes persistent. Cette guerre civile entre 1861 à 1865 fera 600 000 morts. Elle est vite surmontée, les USA se développent et passent de 23% de l’économie mondiale en 1870 à 36% en 1913, quand l’Angleterre régresse de 32% à 14% et la France de 10 à 6%. L’Allemagne monte en puissance, de 13% à 16%.
Les américains s’urbanisent et s’enrichissent, les Noirs migrent vers le Nord industrialisé. La grande dépression de 1930 est difficilement surmontée grâce à la politique keynésienne du New Deal du président Roosevelt, mais l’entrée dans la deuxième guerre mondiale et le début d’une économie de guerre supprime le chômage et dynamise l’économie au prix de 400 000 morts américains.
Dans la deuxième moitié du XXème siècle, pendant la guerre froide, la volonté impérialiste de Staline et son surinvestissement dans le domaine militaire a permis à la Russie de se poser en rival malgré sa faiblesse économique. L’empire soviétique a fini par imploser et les tentatives du dictateur Poutine pour le ressusciter sont vouées à l’échec. Les USA consolident leur domination mondiale.
5 L’hyperpuissance du XXIème siècle ?
Malgré la fragilité de leur système financier et leurs déficits, l’appétit pour le dollar ne faiblit pas et les investisseurs et immigrants continuent à affluer, attirés par des perspectives de réussite ou fuyant une situation difficile dans leurs pays. L’économie continue à croître avec le développement des services, et les USA investissent dans les nouvelles technologies et renforcent leurs moyens militaires sous la pression des lobbies des armes et des guerres qu’ils provoquent.
Avec l’aide des américains qui les financent et ouvrent leur gigantesque marché intérieur, les européens et les japonais se redressent et les tigres asiatiques apparaissent. Mais ils n’ont ni l’intention ni la capacité d’entrer en rivalité de puissance avec les USA, ce sont des alliés politiques solides pour ce pays. Les géants humains peinent à faire décoller leur économie : l’Inde est fragmentée et ferme son économie et la Chine est dans l’impasse du communisme idéologique.
Le melting pot initial, comme assimilation continue des immigrants européens aux USA, devient plus compliqué avec l’importance croissante des immigrants d’autres origines. Les discours anti-immigration se développent, les communautés noires luttent contre les injustices sociales, et les Etats fédérés s’opposent entre eux sous l’influence des rivalités entre les deux grands partis. La violence due aux inégalités économiques et l’impossibilité de gagner la guerre contre la drogue remplissent les prisons. La situation intérieure se tend mais les institutions tiennent bon pour le moment.
Selon les sondages, 71% des électeurs américains jugent la démocratie en danger et à peine 20% font confiance aux leaders religieux et politiques (post 70). Le pouvoir présidentiel perd de sa crédibilité avec les mensonges avérés des Nixon, Bush junior ou Trump. Mais les américains continuent majoritairement à participer aux cultes et aux votes. L’armée reste la seule institution encore respectée et le patriotisme reste vivace comme le prouve son instrumentalisation lors des guerres lancées par Bush.
Les USA furent les premiers à se libérer de la tutelle coloniale européenne, mais restent de « culture occidentale » : christianisme clérical, démocratie électorale, capitalisme innovant et idolâtrie du marché comme régulateur économique et financier, un modèle qu’ils cherchent à exporter. D’autres nations et les pays musulmans contestent ce modèle occidental et appellent à un monde « multipolaire ». Les populistes locaux exacerbent les frustrations car la domination occidentale, militaire, technologique et financière exaspère leur opinion publique.
Le zèle missionnaire des églises et sectes américaines a une ambition mondiale. Elles sont riches grâce à la générosité de leurs fidèles américains. Les évangélistes s’activent jusqu’en Asie, ils recrutent mais agacent par leur dogmatisme et les pressions que subissent les nouveaux convertis. Comme pour les témoins de Jéhovah, il est facile d’entrer dans leur communauté, mais très difficile de s’en libérer. Et pour les musulmans, la conversion au christianisme d’église est un tabou. Quant au catholicisme, le nombre de fidèles grandit au Sud mais s’étiole au Nord. La religion n’est plus un facteur de soft power pour l’Occident.
Pour un monde multipolaire, on évoque la Chine et les BRICS, Brésil, Russie, Inde et Afrique du Sud. Libérée de l’impasse maoïste, la Chine sous Deng prend son envol économique et l’Inde se réveille économiquement depuis les réformes de 1991. En Chine, le vieillissement de sa population et sa politique actuelle de confrontation avec ses voisins et avec l’Occident affaiblira sa dynamique commerciale et ses moyens financiers. L’Inde est une puissance démographique mais pas économique à l’inverse de l’Europe et ni l’une ni l’autre ne sont dans une logique de pyramide de pouvoir conquérant.
Le continent africain verra sa population doubler (post 43) et le dynamisme de sa jeunesse le placera sur le devant de la scène économique et politique mondiale, une évolution déjà visible qui avive la concurrence entre pays riches pour mieux s’y positionner. Le Nigéria devrait émerger comme la première économie du continent et deviendra ensuite l’Etat le plus peuplé du monde après l’Inde, mais le continent restera longtemps fragmenté et revendique la justice plus que la puissance.
Ainsi la domination des USA sur l’échiquier mondial devient moins nette, mais ce pays n’a pas vraiment de rival à sa mesure et il a de nombreux alliés. Le président américain restera donc pour longtemps l’homme le plus puissant de la planète tant qu’il maîtrise son pouvoir en interne, car il doit composer avec des contre-pouvoirs développés par cette nation au fil du temps.
Une hyperpuissance avec un régime présidentiel pose la question du risque pour le monde de voir à la tête des USA un président dominateur voire guerrier. Le post 73 réfléchit aux contre-pouvoirs qui permettent de limiter ce risque.